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Antique monument, débris du peuple Goth,
Qui surgit tout entier de la tête d’Hugo ?…
Moi, dont le corps faiblit, dont l’âme et en tristesse,
Que me font les plaisirs de la molle Lutèce ?
Est-ce pour consoler mon cœur de deuil saisi
Que Taglioni danse et que chante Grisi ?
Pour me verser l’oubli des savanes connues,
Que l’Opéra vomit ses femmes demi-nues ?
Est-ce pour dissiper mon long mal du pays
Ton sourire si doux, gracieuse Anaïs ?
Ô brune Léontine, Andalouse française,
Est-ce pour que mon cœur palpite plus à l’aise,
Est-ce pour l’exilé des pins de Bonfouca
Que s’embrasent ainsi tes yeux de Rebecca ?…
Non !… pour moi, paria, la chambre solitaire,
Pour moi, privé d’amour, pour moi, l’étude austère,
La Cité-Thébaïde et son brouillard de plomb…
Oh ! que ne puis-je entendre, insoucieux colon,
Les arbustes semés en lignes inégales,
Dans ma tiède forêt résonner de cigales !…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Qu’un autre, ingrat enfant, vieux fleuve, te blasphème,
Moi, je te chanterai, Michasippi… je t’aime1 !
Je chanterai toujours, lorsque l’on te maudit,
Tes savanes, tes bois où le bison bondit.