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DU SUJET
ET DE LA FORME
DE CET ÉCRIT.




J’Ai souvent dit que si l’on m’eût donné d’un autre homme les idées qu’on a données de moi à mes contemporains, je ne me serois pas conduit avec lui comme ils font avec moi. Cette assertion a laissé tout le monde fort indifférent sur ce point, & je n’ai vu chez personne la moindre curiosité de savoir en quoi ma conduite eût différé de celle des autres, & quelles eussent été mes raisons. J’ai conclu de-là que le public, parfaitement sûr de l’impossibilité d’en user plus justement ni plus honnêtement qu’il ne fait à mon égard, l’étoit par conséquent que dans ma supposition j’aurois eu tort de ne pas l’imiter. J’ai cru même appercevoir dans sa confiance une hauteur dédaigneuse qui ne pouvoit venir que d’une grande opinion de la vertu de ses guides & de la sienne dans cette affaire. Tout cela, couvert pour moi d’un mystere impénétrable ne pouvant s’accorder avec mes raisons, m’a engagé à les dire pour les soumettre aux réponses de quiconque auroit la charité de me détromper : car mon erreur, si elle existe, n’est pas ici sans conséquence : elle me force à mal penser de tous ceux qui m’entourent ; & comme rien n’est plus éloigné de ma volonté que d’être injuste & ingrat envers eux, ceux

Mémoires. Tome II.
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