Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/342

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Il s’en faut beaucoup, cependant, que je sois insensible aux bontés du Roi de Prusse ; au contraire, elles augmentent un sentiment très-doux, savoir l’attachement que j’ai conçu pour ce grand Prince. Quant à l’usage que j’en dois faire, rien ne presse pour me résoudre, & j’ai du tems pour y penser.

À l’égard des offres de M. Stanley, comme elles sont toutes pour votre compte, Madame, c’est à vous de lui en avoir obligation. Je n’ai point ouï parler de la lettre qu’il vous a dit m’avoir écrite.

Je viens maintenant au dernier article de votre lettre, auquel j’ai peine à comprendre quelque chose, & qui me surprend à tel point, sur-tout après les entretiens que nous avons eus sur cette matiere, que j’ai regardé plus d’une fois à l’écriture pour voir si elle étoit bien de votre main. Je ne sais ce que vous pouvez désapprouver dans la lettre que j’ai écrite à mon Pasteur, dans une occasion nécessaire. À vous entendre avec votre Ange, on diroit qu’il s’agissoit d’embrasser une religion nouvelle, tandis qu’il ne s’agissoit que de rester comme auparavant dans la communion de mes peres & de mon pays, dont on cherchoit à m’exclure ; il ne falloit point pour cela d’autre Ange que le Vicaire Savoyard. S’il consacroit en simplicité de conscience dans un culte plein de mysteres inconcevables, je ne vois pas pourquoi J. J. Rousseau ne communieroit pas de même dans un culte où rien ne choque la raison ; & je vois encore moins pourquoi, après avoir jusqu’ici professé ma religion chez les Catholiques, sans que personne m’en fît un crime, ou s’avise tout-d’un-coup de m’en faire un fort étrange de ce que je ne la quitte pas en pays Protestant.