Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/452

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D’où, il doit arriver que les Evêques auront honte d’élever des oppositions à la tolérance des Protestans, ou que s’ils sont ces oppositions, ils attireront contre eux la clameur publique & peut-être les rebuffades de la Cour.

Sur cette idée, il paroît qu’il ne s’agit pas tant, comme vous le dites très-bien, d’explications sur la doctrine qui sont assez connues & ont été données mille fois, que d’une exposition politique & adroite de l’utilité dont les Protestans sont à la France, à quoi l’on peut ajouter la bonne remarque de M*****. sur l’impossibilité reconnue de les réunir à l’Eglise, & par conséquent sur l’inutilité de les opprimer : oppression qui ne pouvant les détruire, ne peut servir qu’à les aliéner.

En prenant les Evêques, qui, pour la plupart, sont des plus grandes Maisons du Royaume, du côté des avantages de leur naissance & de leurs places, on peut leur montrer avec force combien ils doivent être attachés au bien de l’Etat, à proportion du bien dont il les comble, & des privileges qu’il leur accorde ; combien il seroit horrible à eux, de préférer leur intérêt & leur ambition particuliere, au bien général d’une société dont ils sont les principaux membres ; on peut leur prouver que leurs devoirs de citoyens, loin d’être opposés à ceux de leur ministere, en reçoivent de nouvelles forces ; que l’humanité, la religion, la patrie leur prescrivent la même conduite & la même obligation de protéger leurs malheureux freres opprimés, plutôt que de les poursuivre. Il y a mille choses vives & saillantes à dire là-dessus, en leur faisant honte d’un côté, de leurs maximes barbares, sans pourtant les leur reprocher ; & de l’autre, en excitant contr’eux l’indignation du