Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/82

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assister aux Conseils sans s’en instruire, car c’est là qu’on ose dire la vérité, & les membres de chaque Conseil auront le plus grand intérêt que le Prince y assiste assidument pour en soutenir le pouvoir ou pour en autoriser les résolutions. Il y aura moins de vexations & d’injustices de la part des plus forts, car un Conseil sera plus accessible que le trône aux opprimés ; ils courront moins de risques à y porter leurs plaintes, & ils y trouveront toujours dans quelques membres plus de protecteurs contre les violences des autres que sous le Visirat contre un seul homme qui peut tout, ou contre un demi-Visir d’accord avec ses collègues pour faire renvoyer à chacun d’eux le jugement des plaintes qu’on fait contre lui. L’Etat souffrira moins de la minorité, de la foiblesse ou de la caducité du Prince. Il n’y aura jamais de ministre assez puissant pour se rendre, s’il est de grande naissance, redoutable à son maître même, ou pour écarter & mécontenter les grands, s’il est né de bas lieu ; par conséquent, il y aura d’un côté moins de levain de guerres civiles, & de l’autre plus de sûreté pour la conservation des droits de la Maison Royale. Il y aura moins aussi de guerres étrangères, parce qu’il y aura moins de gens intéressés à les susciter & qu’ils auront moins de pouvoir pour en venir à bout. Enfin le trône en sera mieux affermi de toutes manières ; la volonté du Prince, qui n’est ou ne doit être que la volonté publique, mieux exécutée & par conséquent la nation plus heureuse. Au reste, mon Auteur convient lui-même que l’exécution de son plan ne seroit pas également avantageuse en tous tems ; & qu’il y a des momens de crise & de trouble où il faut