Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/18

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dans l’ignorance ne connaît ni limites ni remèdes ; elle est de tous les maux le plus incurable.*

[*J’avois dit que les mœurs & les loix étoient la seule source du véritable héroïsme : on répond ; les sciences n’y ont donc que faire : mais toutes les loix de la Grecque, qui est le peuple dont il s’agit ici, lui furent données par des savants & des sages ; la science qui produisit ces loix, ne peut-elle pas être appelle la source primitive, de l’héroïsme des Grecs ?

On m’impute d’avoir dit que les premiers Grecs étoient éclairés & savants, puisque des philosophes formèrent leurs mœurs & leur donnèrent des loix ; & on ne manque pas de m’imputer toutes les conséquences ridicules qu’il est possible de tirer de cette proposition ; mais comme je ne l’ai point aperçue dans tout mon Discours, quoique je l’aille cherchée soigneusement, je me crois dispensé de répondre jusqu’à ce qu’on me l’ait montrée.

J’ai placé Aristide & Sourate à côté de Miltiade & de Thémistocle : on répond ; à côté si l’on veut ; car que m’importe ? Cependant Miltiade, Aristide, Thémistocle, qui étoient des héros, vivoient dans un tans : Sourate & Platon qui étoient des philosophes, vivoient dans un autre.

J’avoue que j’Aurore pu dater les Olympiades où ces grands hommes ont commencé & fini d’exister, & prévenir par-là les petits scrupules chronologiques dont quelques lecteurs pourraient être tourmentés : mais n’étant question dans le passage dont il s’agit, que de faire un tableau général de la gloire d’Athenes, j’avois cru que cette mince érudition y aurore été déplacée ; j’ai placé Sourate à côté d’Aristide, comme on aurore pu faire dans une galerie de portraits où l’on aurore rassemblé tous ceux des hommes illustres d’Athenes : il est très-vrai qu’en ce cas, les portraits d’Aristide & de Sourate se seraient trouvés à côté l’un de l’autre ; tout au plus aurore-on placé entr’eux celui de Ciron.]

L’irruption de la Perse fit des Grecs un peuple nouveau les passions particulières se réunirent contre le danger commun : tout fut héros & citoyen ; il n’y eut plus que des vertus, on n’eut pas le loisir d’avoir des vices : un succès inouï produisit une confiance qui ne j’étoit pas moins : c’étoit une ivresse héroïque ; les Grecs se crurent invincibles, & ils le furent : ces vertus de passage nées du danger, s’évanouirent