Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/162

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que ce fût. Quoique je fusse touché de son zèle, je ne pus goûter ses maximes & nous eûmes à ce sujet une dispute très vive, la premier que j’aye eue avec lui ; & nous n’en avons jamais eu que de cette espèce, lui me prescrivant ce qu’il prétendoit que je devois faire, & moi m’en défendant, parce que je croyois ne le devoir pas.

Il étoit tard quand nous nous quittâmes. Je voulus le mener souper chez Mde. D’

[Epina] y, il ne le voulut point ; & quelque effort que le désir d’unir tous ceux que j’aime m’ait fait faire en divers tems pour l’engager à la voir, jusqu’à la mener à sa porte qu’il nous tint fermée, il s’en est toujours défendu, ne parlant d’elle qu’en termes très méprissans. Ce ne fut qu’après ma brouillerie avec elle & avec lui qu’ils se lièrent, & qu’il commença d’en parler avec honneur.

Depuis lors Diderot & G[...]semblèrent prendre à tâche d’aliéner de moi les gouverneurs, leur faisant entendre que si elles n’étoient pas plus à leur aise, c’étoit mauvaise volonté de ma part & qu’elles ne feraient jamais rien avec moi. Ils tâchoient de les engager à me quitter, leur promettant un regrat de sel, un bureau de tabac & je ne sais quoi encore, par le crédit de Mde. D’

[Epina] y. Ils voulurent même entraîner Duclos ainsi que d’H[...]k dans leur ligue ; mais le premier s’y refusa toujours. J’eus alors quelque vent de tout ce manège ; mais je ne l’appris bien distinctement que long-tems après & j’eus souvent à déplorer le zèle aveugle & peu discret de mes amis, qui, cherchant à me réduire, incommodé comme j’étois, à la plus triste solitude,