Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/194

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fut de me livrer à l’impression des objets champêtres dont j’étois entouré. Au lieu de commencer à m’arranger dans mon logement, je commençai par m’arranger pour mes promenades & il n’y eut pas un sentier, pas un taillis, pas un bosquet pas un réduit autour de ma demeure, que je n’eusse parcouru dès le lendemain. Plus j’examinois cette charmante retraite, plus je la sentois faite pour moi. Ce lieu solitaire plutôt que sauvage me transportoit en idée au bout du monde. Il avoit de ces beautés touchantes qu’on ne trouve guère auprès des villes ; & jamais, en s’y trouvant transporté tout d’un coup, on n’eût pu se croire à quatre lieues de Paris.

Après quelques jours livrés à mon délire champêtre, je songeai à ranger mes paperasses & à régler mes occupations. Je destinai, comme j’avois toujours fait, mes matinées à la copie & mes après-dînées à la promenade, muni de mon petit livret blanc & de mon crayon : car n’ayant jamais pu écrire & penser à mon aise que sub dio, je n’étois pas tenté de changer de méthode & je comptois bien que la forêt de Montmorency, qui étoit presque à ma porte, seroit désormois mon cabinet de travail. J’avois plusieurs écrits commencés ; j’en fis la revue. J’étois assez magnifique en projets ; mais dans les tracas de la ville, l’exécution jusqu’alors avoit marché lentement. J’y comptois mettre un peu plus de diligence quand j’aurois moins de distraction. Je crois avoir assez bien rempli cette attente ; & pour un homme souvent malade, souvent à la C[...]e, à é

[pina] y, à Eaubonne, au château de Montmorency, souvent obsédé chez lui de curieux désœuvrés,