Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/199

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ces choses hardies n’excitèrent aucune rumeur contre les deux premiers ouvrages ; donc ce ne furent pas elles qui l’excitèrent contre les derniers.

Une autre entreprise à peu près du même genre, mais dont le projet étoit plus récent, m’occupoit davantage en ce moment : c’étoit l’extrait des ouvrages de l’abbé de St. Pierre, dont, entraîné par le fil de ma narration, je n’ai pu parler jusqu’ici. L’idée m’en avoit été suggérée, depuis mon retour de Genève, par l’abbé de Mably, non pas immédiatement, mais par l’entremise de Mde. D[...]n, qui avoit une sorte d’intérêt à me la faire adopter. Elle étoit une des trois ou quatre jolies femmes de Paris dont le vieux abbé de St. Pierre avoit été l’enfant gâté ; & si elle n’avoit pas eu décidément la préférence, elle l’avoit partagée au moins avec Mde. d’A

[iguillo] n. Elle conservoit pour la mémoire du bon homme un respect & une affection qui faisoient honneur à tous deux & son amour-propre eût été flatté de voir ressusciter par son secrétaire les ouvrages mort-nés de son ami. Ces mêmes ouvrages ne laissoient pas de contenir d’excellentes choses, mais si mal dites, que la lecture en étoit difficile à soutenir ; & il est étonnant que l’abbé de St. Pierre, qui regardoit ses lecteurs comme de grands enfans, leur parlât cependant comme à des hommes, par le peu de soin qu’il prenoit de s’en faire écouter. C’étoit pour cela qu’on m’avoit proposé ce travail comme utile en lui-même & comme très convenable à un homme laborieux en manœuvre, mais paresseux comme auteur, qui trouvant la peine de penser très fatigante, aimoit mieux, en choses de son goût,