Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/347

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du mérite & de l’esprit : mais il étoit un peu l’original de sa comédie, un peu fat auprès des femmes, & n’en fut pas extrêmement regretté.

Mais je ne puis omettre une correspondance nouvelle de ce temps-là, qui a trop influé sur le reste de ma vie pour que je néglige d’en marquer le commencement. Il s’agit de M. de L

[amoignon] de M

[alesherbe] s, premier président de la Cour des Aides, chargé pour lors de la librairie, qu’il gouvernoit avec autant de lumières que de douceur, & à la grande satisfaction des gens de lettres. Je ne l’avois pas été voir à Paris une seule fois ; cependant j’avois toujours éprouvé de sa part les facilités les plus obligeantes, quant à la censure, & je savois qu’en plus d’une occasion il avoit fort malmené ceux qui écrivoient contre moi. J’eus de nouvelles preuves de ses bontés au sujet de l’impression de la Julie ; car les épreuves d’un si grand ouvrage étant fort coûteuses à faire venir d’Amsterdam par la poste, il permit, ayant ses ports francs, qu’elles lui fussent adressées, & il me les envoyoit franches aussi sous le contre-seing de M. le chancelier son père. Quand l’ouvrage fut imprimé, il n’en permit le débit dans le royaume, qu’ensuite d’une édition qu’il en fit faire à mon profit, malgré moi-même : comme ce profit eût été de ma part un vol fait à Rey, à qui j’avois vendu mon manuscrit, non-seulement je ne voulus point accepter le présent qui m’étoit destiné pour cela, sans son aveu, qu’il accorda très-généreusement ; mais je voulus partager avec lui les cent pistoles à quoi monta ce présent & dont il ne voulut rien. Pour ces cent pistoles, j’eus le désagrément