Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t4.djvu/39

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ne ramene jamais à ceux-là. Les femmes ont cessé d’être mères ; elle ne le seront plus ; elles ne veulent plus l’être. Quand elles le voudroient, à peine le pourroient-elles ; aujourd’hui que l’usage contraire est établi, chacune auroit à combattre l’opposition de toutes celles qui l’approchent, liguées contre un exemple que les unes n’ont pas donné et que les autres ne veulent pas suivre.

Il se trouve pourtant quelquefois encore de jeunes personnes d’un bon naturel, qui, sur ce point osant braver l’empire de la mode & les clameurs de leur sexe, remplissent avec une vertueuse intrépidité ce devoir si doux que la nature leur impose. Puisse leur nombre augmenter par l’attroit des biens destinés à celles qui s’y livrent ! Fondé sur des conséquences que donne le plus simple raisonnement, et sur observations que je n’ai jamais vues démenties, j’ose promettre à ces dignes mères un attachement solide & constant de la part de leurs maris, une tendresse vraiment filiale de la part de leurs enfans, l’estime & le respect du public, d’heureuses couches sans accident & sans suite, une santé ferme & vigoureuse, enfin le plaisir de se voir un jour imiter par leurs filles, & citer en exemple à celles d’autrui.

Point de mère, point d’enfant. Entre eux les devoirs sont réciproques ; & s’ils sont mal remplis d’un côté, ils seront négligés de l’autre. L’enfant doit aimer sa mere avant de savoir qu’il le doit. Si la voix du sang n’est fortifiée par l’habitude & les soins, elle s’éteint dans les premières années, & le cœur meurt pour ainsi dire