Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/385

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vanité des armes brillantes, de superbes chevaux, de pompeux équipages, & tous les apprêts du luxe & de la volupté pour ceux de la guerre. Tandis que les ſages veilloient au repos de la République, mille étourdis ſans prévoyance s’énorgueilliſſoient d’un vain eſpoir ; pluſieurs, qui s’étoient mal conduits durant la paix ſe réjouiſſoient de tout ce déſordre, & tiroient du danger préſent leur ſureté perſonnelle.

Cependant le Peuple, dont tant de ſoins paſſoient la portée, voyant augmenter le prix des denrées & tout l’argent ſervir à l’entretien des Troupes, commença de ſentir les maux qu’il n’avoit fait que craindre après la révolte de Vindex, tems où la guerre allumée entre les Gaules & les Légions, laiſſant Rome & l’Italie en paix, pouvoit paſſer pour externe. Car depuis qu’Auguste eût aſſuré l’Empire aux Céſars, le Peuple Romain avoit toujours porté ſes armes au loin & ſeulement pour la gloire & l’intérêt d’un ſeul. Les regnes de Tibere & de Caligula n’avoient été que menacés de guerres civiles. Sous Claude les premiers mouvemens de Scribonianus furent auſſi-tôt réprimés que connus ; & Néron même fut expulſé par des rumeurs & des bruits plutôt que par la force des armes. Mais ici l’on avoit ſous les yeux des Légions, des flottes, & ce qui étoit plus rare encore, les Milices de Rome & les Prétoriens en armes. L’Orient & l’Occident avec toutes les forces qu’on laiſſoit derriere ſoi, euſſent fourni l’aliment d’une longue guerre à de meilleurs Généraux. Pluſieurs s’amuſant aux préſages, vouloient qu’Othon différât ſon départ jusqu’à ce que les boucliers ſacrés fuſſent prêts. Mais excité par la diligence de Cecina