Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t9.djvu/760

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entre le grave & l’aigu qu’occupent les Toniques. Ils différent encore par les diverses altérations des Sons & des Intervalles, produites en chaque Ton par le Tempérament ; de sorte que, sur un Clavecin bien d’accord, une oreille exercée reconnoît sans peine un Ton quelconque dont on lui fait entendre la Modulation ; & ces Tons se reconnoissent également sur des Clavecins accordés plus haut ou plus bas les uns que les autres : ce qui montre que, cette connoissance vient du moins autant des diverses modifications que chaque Ton reçoit de l’Accord total, que du degré d’élévation que la Tonique occupe dans le Clavier.

De-là naît une source de variétés & de beautés dans la Modulation. De-là naît une diversité & une énergie admirable dans l’expression. De-là naît enfin la faculté d’exciter des sentimens différens avec des Accords semblables frappés, en différens Tons. Faut-il du majestueux, du grave ? L’F ut sa, & les Tons majeurs par Bémol l’exprimeront noblement.. Faut-il du gai, du brillant ? Prenez À mi la, D la re, les Tons majeurs par Dièse. Faut-il du touchant, du rendre ? Prenez les Tons mineurs par Bémol. C sol ut mineur porte la tendresse dans l’ame ; F ut fa mineur va jusqu’au lugubre & à la douleur. En un mot, chaque Ton, chaque Mode, a son expression propre qu’il faut savoir connoître, & c’est là un des moyens qui rendent un habile Compositeur maître, en quelque maniere, des affections de ceux qui l’écoutent :. c’est une espece d’équivalent aux Modes anciens, quoique, fort éloigné de leur variété & de leur énergie.

C’est pourtant de cette agréable & riche diversité que M.