Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/259

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gracieux soupirant dont elle avait vite partagé le fougueux sentiment.

Un prétexte fort plausible expliquait aux yeux de Mossem l’assiduité du nouveau page auprès de la favorite.

Éjur, à ce moment, était infesté par une légion de moustiques dont la piqûre donnait les fièvres. Or, Naïr savait fabriquer des pièges qui prenaient infailliblement les dangereux insectes.

Il avait découvert comme amorce une fleur rouge dont le parfum très violent attirait de loin les bestioles à capturer. Certaines enveloppes de fruits lui fournissaient des filaments d’une extrême ténuité, avec lesquels il exécutait lui-même un tissu plus fin que les toiles d’araignée, mais suffisamment résistant pour arrêter les moustiques au passage. Ce dernier travail demandait une grande précision, et Naïr ne le menait à bien qu’à l’aide d’une longue formule dont le texte récité par cœur lui indiquait un par un chaque mouvement à faire et chaque nœud à former.

Djizmé, comme une enfant, extrayait un plaisir toujours nouveau du spectacle offert par l’industrieux agencement des fils s’enchevêtrant délicatement sous les doigts de son amant.

La présence de Naïr se trouvait ainsi motivée par la puissante distraction que procurait à