Page:Routhier - Le Centurion, roman des temps messianiques, 1909.djvu/108

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
104
LE CENTURION

poésie. Gamaliel m’a lu une idylle délicieuse qui est intitulée le Livre de Ruth. Rien n’est plus touchant de naïveté et de grâce que l’histoire de cette glaneuse idéale, venue de Moab, qui suit les moissonneurs de Booz en ramassant les épis qu’ils laissent tomber, et qui finit par glaner le cœur du maître. Booz fut séduit et l’épousa ; et c’est ainsi que la belle moabite devint la mère d’Obed et l’aïeule du roi David.

— On dit même, ajoute Gamaliel, que Jésus de Nazareth serait un de ses descendants.




Aujourd’hui, Gamaliel m’a récité (car il le sait presque par cœur) le Cantique des Cantiques.

Le ciel était d’un azur sans tache, et jamais la mer ne nous avait paru si belle.

Sous les reflets rougeâtres du soleil couchant elle était toute moirée de lueurs incandescentes.

Une brise légère enflait les voiles de la Nausicaa, et nous glissions mollement à travers les petites vagues de feu dans le grand cirque de Neptune.

Des nuages roses montaient du Nord et s’attroupaient d’une façon inquiétante. Ils allaient devenir noirs quand le soleil aurait disparu. Mais en attendant ils formaient un beau décor à l’horizon.

— Quel calme ravissant, dis-je à Gamaliel, dans cet immensité vide qui nous entoure ! Et quelle douce solitude !