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LE CENTURION

Eh ! bien, mon cher ami, si je t’écris en ce moment, c’est moins pour t’assurer de mon amitié que pour te raconter un commencement d’aventure qui pourrait devenir une délicieuse idylle, ou un drame.

Est-ce Vénus qui veut me punir de l’avoir méprisée dans la dernière lettre que je t’ai écrite ? Ou bien, est-ce Vesta qui veut me récompenser d’avoir fait son éloge ? Je n’en sais rien encore ; j’incline à croire cependant que ce n’est pas une prêtresse de Cythère, mais bien plutôt une vestale, que j’ai rencontrée il y a deux jours.

Je revenais à cheval d’une course à Tibériade, lorsque j’aperçus dans une avenue qui conduisait à une élégante villa une jeune femme ou fille, accompagnée de sa suivante, gravissant la colline à pas précipités. Je compris qu’elle fuyait effrayée devant un jeune homme, qui courait après elle, et qui allait l’atteindre. En bon policier, je volai à son secours, et je n’eus qu’à tirer mon épée pour que l’importun prit la fuite.

Elle me remercia en termes émus, et je la reconduisis jusqu’à sa porte. Elle m’invita à entrer, mais en levant à peine les yeux sur moi. Je déclinai l’invitation et pris congé, en sollicitant la faveur d’aller prendre de ses nouvelles. Mais elle ne répondit rien, et quand j’y suis allé hier, je n’ai pas été reçu.

Mon cher ami, tu me connais : Je ne suis ni exalté, ni enthousiaste, ni inflammable. Eh ! bien,