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LE CENTURION

C’était une longue procession de tuniques noires traînantes, d’hommes et de femmes voilées qui poussaient des plaintes, et qui faisaient entendre des psalmodies monotones et tristes. Le corps du mort était étendu sur un brancard porté par quatre hommes, et couvert seulement d’un voile noir. Ce qui ajoutait à la tristesse de ce spectacle, c’était la musique, bruyante, sans art ni harmonie, et d’une monotonie désespérante, qui se mêlait aux gémissements des pleureurs et des pleureuses. Bientôt se dessinèrent, à notre gauche, dans un pli de la colline, les sépulcres blanchis d’un vieux cimetière.

Je me rappelai notre admirable Via Appia avec ses somptueux monuments funèbres, et je m’affligeai du contraste.

Mais notre Via Appia n’a jamais vu et ne verra jamais ce que mes yeux ont vu alors.

Tout à coup, sur le sommet de la colline, à quelques cents pas devant nous, apparut une autre procession d’hommes, de femmes et d’enfants qui venait à notre rencontre. En tête, marchait à grands pas, drapé dans les longs plis de sa tunique blanche, le Prophète de Nazareth.

À cette vue, j’éprouvai, je ne sais pourquoi, un tressaillement irrépressible. J’étais loin de m’attendre à ce qui allait arriver, et le fait de cette foule croisant un convoi funéraire n’avait rien d’extraordinaire. Et cependant, il me sembla qu’il