Page:Roy - Bigot et sa bande et l'affaire du Canada, 1950.djvu/137

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aller prendre le commandement du fort Frontenac. C’était là un fait sans précédent dans l’histoire militaire de la colonie. Un lieutenant de Roi, commandant d’un fort. Mais l’auteur du Mémoire sur les affaires du Canada de 1749 jusqu’à 1760 explique cette déchéance apparente.

« On lui avait donné ce commandement, qui était au-dessous de son grade, dit-il, pour améliorer ses affaires qui étaient extrêmement dérangées. Cet officier était savant, poète, et se mêlait de la médecine ; sa verve avait été un peu piquante, ce qui lui avait attiré quelques ennemis ; et M. de Vaudreuil qui n’était pas savant, le haïssait, quoiqu’il lui eut quelques obligations ; il avait 68 ans et était infirme, mais dans cet âge avancé il conservait toute la liberté de son esprit et était en état de faire honneur à un poste qu’on lui donnerait à défendre avec des forces suffisantes ».

En réalité, M. de Noyan n’avait que soixante-trois ans, mais même à cet âge il fallait agir vite pour rétablir ses affaires car la retraite devait sonner bientôt pour lui. Aussi, M. de Noyan se mit à l’œuvre dès son arrivée au fort Frontenac. Dans son témoignage devant le Châtelet de Paris, le munitionnaire Cadet déclara qu’il avait souvent donné des sommes d’argent au sieur de Noyan. Et, comme Cadet, ne donnait jamais rien pour rien, nous avons le droit de supposer que M. de Noyan grossissait ses états de ration et rendait bien d’autres services à ce peu scrupuleux personnage.