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est-il dissous & fétide, il convient alors d’avoir recours aux breuvages d’assa-fœtida, de gomme ammoniac, à la dose de demi-once de chaque, bouillie dans une livre de bon vinaigre. La mortification fait-elle des progrès, malgré tous ces remèdes, les anti-gangreneux, tels que le quinquina, l’hipécacuanha, le camphre dans une décoction de baies de genièvre macérées dans le vinaigre, doivent être administrés. Séparée des parties saines & vives, la plaie demande d’être pansée avec le digestif plus ou moins animé, suivant les cas & les circonstances, & cela jusqu’à parfaite cicatrisation : les dessiccatifs sont proscrits. L’ulcère cicatrisé, on achève la cure par la médecine suivante : une once de feuilles de séné, sur laquelle on jette une livre d’eau bouillante, & à laquelle on ajoute une once d’aloës & deux drachmes de camphre, afin d’entraîner au dehors un reste d’humeur, qui peut avoir été apporté dans le sang par les vaisseaux absorbans de l’ulcère.

Ce qui caractérise essentiellement cette espèce de charbon, c’est qu’il est épizootique, & qu’il se transmet facilement à un animal sain. Si un bœuf, qui en est atteint, communique avec un troupeau de bœufs ou de vaches, aussi-tôt la contagion gagne, & la plupart de ces animaux sont infectés, quoiqu’ils habitent un ciel pur, qu’ils mangent d’excellens fourrages, qu’ils boivent de la bonne eau, & qu’ils habitent des étables propres. L’homme contracte également le charbon, pour avoir touché seulement un animal semblable. En 1776, un paysan d’une paroisse de notre département, après avoir tué un bœuf atteint de ce mal, & dont le foie & les poumons se trouvoient viciés, fut attaqué d’un charbon au bras droit, accompagné d’une fièvre aiguë, avec vomissement & diarrhée putride, qui lui donna la mort dans trois jours ; un autre & deux chiens moururent le second jour, pour avoir mangé de sa chair. Tous ces exemples ne devroient-ils pas bien rendre les habitans de la campagne un peu plus attentifs aux dangers de la contagion ? M. T.

Charbon à la langue, Médecine vétérinaire. Cette maladie se manifeste par une vessie à la langue, qui en occupe tantôt le dessous, tantôt le dessus, & quelquefois les côtés. Elle est d’abord blanche, ensuite rouge, & en très-peu de temps elle devient livide & noire. Elle augmente considérablement en grosseur, & dégénère en ulcère chancreux, qui ronge toute l’épaisseur de la langue, ce qui conduit l’animal à la mort ; le mal est si prompt, qu’en moins de vingt-quatre heures, on voit quelquefois le commencement, les progrès & la fin de la maladie. Aucun signe extérieur ne l’annonce, il n’y a que l’inspection de la langue qui la fasse connoître ; ce qu’il y a de surprenant, c’est que l’animal mange, boit, fait toutes ses fonctions comme à l’ordinaire, jusqu’à ce que la langue soit tombée par pièces & par lambeaux.

Ce mal attaque les ânes, les mulets, les chevaux & les bœufs. Il se communique non-seulement par le contact immédiat de l’humeur qui sort de la plaie, mais encore par les instrumens dont on se sert pour la panser. Comme il est épizootique &