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la morve, doivent être séparés de bonne heure des animaux sains, si l’on ne veut pas que ces derniers soient bientôt atteints de la maladie.

2°. Dans les temps où le claveau attaque les bêtes à laine, on doit également séparer les bêtes saines de celles qui sont malades, parce qu’en donnant des bornes au mal, il est plus facile de le prévenir, ou du moins de le rendre moins funeste. (Voyez Claveau)

Mais, dans la circonstance d’une fièvre maligne, putride, gangréneuse & pestilentielle, semblable à celle qui a détruit dernièrement les bœufs de quelques provinces, & qui a plongé les habitans dans la misère, les moyens à employer sont de la plus grande importance. Il s’agit,

1°. De tenir toutes les bêtes saines enfermées, & même séparées, s’il est possible, parce qu’un animal peut être malade pendant quelques jours, sans qu’on s’en apperçoive, & que, dans cet état, il peut communiquer aux autres animaux le mal dont il est infecté.

2°. D’empêcher que les animaux sains ne soient approchés par les hommes qui fréquentent, ou qui soignent les bêtes malades. L’expérience n’a malheureusement que trop prouvé, que les hommes & leurs habits pouvoient transporter la contagion, non-seulement d’une étable à l’autre, mais aussi, des granges infectées dans les granges saines, & à cinq ou six lieues de distance, puisqu’on a vu des maréchaux, après avoir soigné les bêtes malades à une journée de leur domicile, porter la maladie dans leur propre étable, en rentrant chez eux.

3°. De se mettre en garde contre les hommes qui viennent des villages voisins, & ne point les laisser approcher des animaux sains, non plus que les charlatans qui s’annoncent pour guérir la maladie : ces coureurs persuadent aux habitans de la campagne, que leurs bêtes sont malades, tandis qu’elles sont saines ; leur donnent des remèdes pendant quelques jours, se vantent ensuite de les avoir guéris, se font donner des certificats qu’ils vont mettre à profit, de village en village, aux dépens d’un peuple trop crédule & mal instruit sur les vrais symptômes de la maladie. Bien loin de guérir le mal, ils ne servent qu’à l’augmenter, en portant la contagion dans les lieux sains.

4°. De faire vêtir ceux qui soignent les bêtes malades, d’une souquenille de toile cirée, pour être moins sujets à prendre & à transporter avec eux le virus pestilentiel ; de leur faire laver les mains & les habits avec du vinaigre, avant que d’approcher aucune bête saine, sans quoi ils risqueroient de l’infecter.

5°. De se garder contre les seaux, les auges, les râteliers, les harnois, & autres ustensiles qui auront servi aux animaux malades. Le plus sûr est de les brûler, ou de les enterrer avec les animaux, ainsi que leurs fumiers.

6°. De ne point ouvrir, sans précaution, les cadavres des animaux, ou de les dépouiller de leur peau. Deux hommes du pays de Gévaudan périrent en deux jours, au mois de décembre 1774, pour avoir écorché des bœufs morts d’une semblable maladie. Pareils accidens sont arrivés dans d’autres provinces : il est donc important que les animaux soient