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Parmi ceux qui sèment dans des trous, il y en a qui disposent le terrein en tables de six à dix pieds de largeur. Ce travail est surnuméraire, si on ne craint pas l’effet de la trop grande humidité ou de la submersion ; mais, dans l’un ou l’autre cas, il est indispensable, parce que la rigueur du froid, jointe à l’aquosité, fait périr souvent les plantes.

Dès que les grains ont germé, dès que la plante a pris une certaine consistance, c’est le cas, dans les deux méthodes, d’arracher les plantes surnuméraires les moins bien venues, sans cependant déchausser ou attaquer les racines des plantes qui doivent rester sur pied. Il ne seroit pas prudent d’exécuter rigoureusement ce sarclage ; il convient de le répéter à la fin de l’hiver, & alors de laisser seulement les pieds qui doivent produire. Les plantes arrachées à cette époque, serviront à remplacer celles qui auront péri par une cause quelconque. Je le répète, ce chardon ne craint pas le froid le plus rigoureux de France, s’il n’est pas planté dans un sol qui retienne l’eau.

Des soins à donner à la plante. Il est important de sarcler souvent ; la plante profite de ce petit travail, & sa substance n’est pas dévorée par les mauvaises herbes. Dès que ses feuilles sont assez grandes, le sarclage devient inutile, elles étouffent les plantes qui naissent à leur pied. Dans les pays méridionaux, si on peut, lorsque le besoin l’exige, arroser les plantations, on sera assuré d’avoir une récolte abondante.

La récolte des têtes est longue, parce qu’elles ne mûrissent pas toutes en même-temps. L’époque de cette récolte est indiquée par la chute des fleurs qui se détachent de leur calice. Ainsi, tous les deux jours, il faut parcourir la chardonnière, couper la tige, qui soutient la pomme, à la longueur d’un pied, ranger dans la main & par paquets ces tiges coupées, & mettre cinquante tiges au paquet ; lier chaque poignée avec de l’osier, les exposer sur le champ au gros soleil, suivant quelques-uns ; & si on craint la pluie, les porter sous des hangars. On suspend ces paquets, & on les attache, les têtes en bas, à des cordes, afin qu’un libre courant d’air, les dessèche plus vite. Lorsque la dessiccation est complète, les paquets sont secoués sur des planchers bien nets, afin d’en recueillir la graine. Ces procédés ne sont pas sans défauts.

1o. Lorsque la pomme est desséchée par le soleil, elle jaunit, elle rougit, & les piquans ou crochets deviennent trop roides. 2o. Cette graine n’est jamais bien mûre, & il faut en semer le double en pure perte. Il vaut mieux laisser sur pied le nombre de tiges proportionné à la quantité de semences dont on a besoin, &, de temps à autre, parcourir la chardonnière ; secouer sur un paillasson, ou sur tel autre réceptacle, les pommes qui paroissent bien mûres, & on sera assuré de n’avoir que des graines bien nourries.

Lorsque tous les paquets sont complétement desséchés, il faut les porter dans un lieu où l’on ne craigne pas les effets de l’humidité, & les mettre en monceaux, afin qu’ils tiennent moins de place.

Les pommes de chardon les plus estimées, sont celles dont la forme