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qu’il est insoluble dans l’esprit de vin qui précipite le tartre contre les parois des futailles à mesure que la fermentation insensible perfectionne cet esprit de vin. Est-ce donc à raison de la base argileuse ou vitriolique de l’alun qu’il resserre les principes constituans du vin ? c’est ce qu’il faudroit prouver, & je n’entrevois pas comment on y parviendroit. (Voyez ce qui est dit au mot Aluner)

Si l’alun peut produire quelque effet, étant dissous dans le vin, c’est par son air de composition qui se dissémine dans le fluide, & cet air est le modérateur de la décomposition ou de la désagrégation des principes des corps. Ainsi, en supposant que l’acide tartreux de la grappe s’unisse au mout dans la cuve, il sera bientôt précipité lorsque le spiritueux sera formé, & il se déposera dans les barriques.

On confond mal à propos les vins verts avec les vins âpres ou durs : ils sont verts lorsque le raisin n’a pas acquis la maturité convenable ; ils sont âpres & durs, lorsque le vin a fermenté avec la grappe, & cette rudesse & cette âpreté ne dépendent point de l’acide, proprement dit, de la grappe, mais du suc austère qu’elle contient ; & il tire cette austérité du suc même de la végétation, de la sève de la vigne.

Pour peu qu’on connoisse la statique des végétaux, les moyens employés par la nature pour modifier & perfectionner les sucs destinés à former les fruits & les semences, on verra que le grain du raisin tient à la grappe par un pédicule très petit & très-délié ; que la grappe raffine les sucs qui lui sont envoyés par le cep ; que ce petit pédicule raffine à son tour ceux qui lui sont communiqués par la grappe ; enfin, que l’enveloppe herbacée qui recouvre l’enveloppe presque ligneuse des pépins, absorbe le peu qui reste de cette astriction végétale dans le suc du raisin : il suffit de mâcher ces pépins pour s’en convaincre ; moins le raisin est mûr & plus ils sont âpres, & l’amande qu’ils contiennent est douce. L’industrie de l’homme a su tirer un grand parti de ce fruit ; mais la nature songeoit bien plutôt à la formation & à la perfection de l’amande qui devoit reproduire la plante ; ce pépin est, en dernière analyse, la quintessence de tous les sucs, & la partie qui recèle le plus d’air inflammable.

4. Lorsque, par une cause quelconque, il y a surabondance d’eau dans les raisins, la grappe améliore les vins. &c. Rien ne peut améliorer une liqueur, que la bonne combinaison de ses principes ou l’addition des principes qui lui manquent. Comme je le dirai à l’article Vin, la grappe ne contient aucune partie sucrée ; elle ne produit donc aucun spiritueux. Dans les années pluvieuses, l’acide surabonde dans le vin, parce qu’il y a peu de parties sucrées & pas en quantité suffisante pour le masquer ; il est donc inutile d’ajouter un acide qui ne constitue pas le vin & ne lui fournit aucun principe ; autant vaut-il ajouter des sarmens coupés en morceaux. Le goût vineux est certainement bien éloigné du goût âpre, & le meilleur de tous les vins est celui qui ne porte aucune impression d’astriction sur le palais. Je ne doute pas du fait rapporté par M. Maupin, lorsqu’il dit qu’on a donné