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Section V.

De la Distillation de la bière, du cidre & du poirée.

Les mêmes vaisseaux, les mêmes procédés employés à la distillation du vin, servent à celle des liqueurs préparées avec les semences farineuses, ou du cidre ou du poirée. Les eaux-de-vie de grains, dont il se fait une si grande consommation dans les royaumes du nord, ont toujours une odeur de brûlé & un goût détestable ; il est presque impossible que cela ne soit pas ainsi, attendu la viscosité de la bière & la quantité de son mucilage. Le peuple de ces pays trouve cependant cette eau-de-vie excellente ; sans doute, c’est par habitude, & sur-tout, parce qu’il n’est pas à même de la comparer avec une eau-de-vie bien faite tirée du vin.

Quoique j’aie vu immensément distiller de pareilles eaux-de-vie, je ne puis rien dire de plus, parce que je n’ai jamais été dans le cas de faire des expériences en ce genre. Malgré cela, je vais hasarder une idée qui me paroît fondée sur les principes de la distillation.

Je pense, 1°. qu’en distillant de la bière bien clarifiée, son eau-de-vie auroit moins de mauvais goût ; 2°. qu’en mettant à part les premiers produits du spiritueux, lorsque le phlegme a passé, cette portion seroit plus pure ; les derniers produits serviroient à la repasse, ou pourroient être ajoutés à une nouvelle chauffe, & ainsi de suite de chauffe en chauffe ; 3°. ces premiers produits seroient étendus dans une suffisante quantité d’eau, & ensuite mis en digestion & distillés, ainsi qu’il a été dit précédemment ; 4°. que si on n’emploie pas ce procédé, il convient de distiller au bain-marie. J’ai peine à croire, malgré ces précautions, que les eaux-de-vie de grain soient aussi fines que les eaux-de-vie bien faites retirées du vin, & qu’elles ne conservent pas toujours un peu d’acrimonie ; mais elles seront à tous égards préférables aux eaux-de-vie en ce genre, qui circulent dans le commerce.

Au mot Eau-de-vie, nous parlerons de celles du cidre & du poirée relativement au commerce.


CHAPITRE IV.

De la Distillation, relativement à la fabrication des liqueurs.


Dans les grandes brûleries le chapiteau de l’alambic est à nu, ainsi qu’il est représenté dans la Planche 8, du tome I, & on a supprimé les réfrigérans placés autrefois sur ce chapiteau, & que M. Moline a conserve avec raison dans ceux qu’il propose. (Voyez Planche 9, du même volume) Je suis du même avis que lui, quoique je n’adopte pas le courant continuel d’eau fraîche, qui tombe dans ce réfrigérant ; il suffit qu’il soit rempli d’eau, & qu’elle soit renouvelée suivant le besoin. L’expérience journalière prouve que les alambics des distillateurs liquoristes, garnis de leur réfrigérant & du serpentin plongé dans une pipe d’eau froide, fournissent une eau-de-vie plus douce, plus suave que les autres ; que si on distille le vin au bain-marie, l’esprit est encore d’une qualité supérieure : je conviens que la longueur de cette dernière opération augmente les frais ; mais il s’agit ici de la