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à tanches. Sans cette précaution indispensable, les gros brochets ne trouvant pas une nourriture abondante, mangeront leurs petits.

L’ordonnance des eaux & : forêts a établi cette règle pour le rempoissonnement des étangs qui appartiennent au Roi, ou aux églises, ou aux communautés, que le carpeau aura six pouces au moins, la tanche cinq, la perche quatre, & le brocheton de tel échantillon qu’on voudra ; mais qu’on ne pourra le jeter qu’un an après l’empoissonnement au plutôt.

Il est imposable d’établir une loi générale pour l’empoissonnement & la pêche des étangs, ni fixer d’une manière exactement déterminée, la quantité d’alevin ou de pièces. Ces objets varient, 1°. sur l’étendue de l’étang : un millier n’est pas trop, si elle est considérable, & cinq cens alevins suffisent, & au-delà, si l’étang n’est que d’un arpent. 2°. La chaleur du climat mérite d’être prise en considération. Plus l’eau s’échauffe, plus elle perd de cet air qu’elle contient, & plutôt elle est viciée, & par elle-même & par l’inspiration & respiration sans cesse répétées par le poisson. Si son nombre est considérable, cette eau sera encore plus complètement viciée ; 3°. La nature du sol ainsi que celle de l’eau prononcent encore sur la quantité des poissons ; les fonds gras, limoneux & bourbeux, ainsi que les bords de l’étang, servent bien mieux d’asile à une multitude prodigieuse d’insectes, qu’un fond & des bords sablonneux ; mais comme entre le sol sablonneux & bourbeux, il y a beaucoup de nuances, c’est au propriétaire à étudier la nature du sol de son étang, & à le peupler après l’avoir bien observée. Ce que je dis du terrein s’applique également à la qualité de l’eau. Celle qui coule entre des rochers secs & arides, ou celle qui sort directement d’une ou plusieurs sources voisines, entraîne avec elle très peu ou presque point de nourriture ; celle au contraire qui, après avoir reçu les immondices d’un village, d’une ville, se jette dans un étang, y amène l’abondance ; dès-lors la multiplication & l’embonpoint du poisson font assurés, &c.

III. Du frai. Ce mot a deux significations : la première désigne l’amour des poissons, & on dit, le poisson fraie ; la seconde indique une matière gélatineuse, plus ou moins épaisse dans laquelle sont parsemés les œufs : s’ils n’ont pas été fécondés par le mâle à mesure que la femelle les pond, ces œufs n’éclosent pas. Les mois de mars, avril & mai sont les époques de l’apparition du frai suivant le degré de chaleur de la saison ou du climat.

Le poisson ne s’accouple pas comme les quadrupèdes, les oiseaux ou les insectes. Lorsque le temps des amours est venu, les femelles se portent en foule vers les bords de l’étang, & chacune est suivie d’un ou de plusieurs mâles ; elles traînent leur ventre sur la terre ayant quelquefois une grande partie de leur corps hors de l’eau, afin d’augmenter la force de cette pression qui les aide à se débarrasser du frai. Les mâles se tiennent près des femelles & sur les côtés ; ils pressent également leur ventre contre la terre & il en fort un peu de liqueur légèrement blanchâtre qui vivifie tout le frai.

Le second but de la nature dans