Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/604

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la petitesse des surfaces paraît avoir été compensée par le nombre des feuilles. Ces espèces ont plus de feuilles dans un espace donné, que n’en ont, dans le même espace, celles qui portent de plus grandes feuilles. La prêle, le pin, le sapin, en fournissent des exemples. &c. &c. »

§. III. Feuille considérée comme organe de la transpiration. Si les feuilles ont la fonction de pomper l’air & l’humidité qui forment la base de la sève descendante, elles jouissent encore d’une autre faculté non moins essentielle, celle de transpirer & de porter hors de la plante tout ce qui ne peut plus servir à son entretien, son accroissement & sa vie. La plante paroît transpirer par toutes ses parties, mais plus spécialement encore par ses feuilles.

Pour le prouver en général, une expérience très-simple suffit : il s’agit de prendre une feuille, de la peler au moment qu’on vient de l’arracher, & de la repeler quelque temps après, lorsqu’elle commencera à se faner, & ensuite lorsqu’elle sera passée tout-à-fait, on s’appercevra bientôt qu’elle aura perdu de son poids. Si l’on renferme dans un vase de verre une branche d’arbre chargée de feuilles, & qu’on la mastique à l’orifice du vase, de façon qu’il ne puisse rien en échapper, on trouvera, au bout de deux ou trois jours, le fond du vase de verre plein d’une certaine quantité d’eau limpide & sans couleur. Comme la transpiration est en raison des surfaces, plus la feuille est large, plus elle transpire, toutes choses égales d’ailleurs ; & par conséquent, plus un arbre, une plante a de feuilles, & plus aussi sa transpiration est abondante ; & plus une plante est vigoureuse, plus elle transpire. La transpiration végétale offre une infinité de phénomènes très-intéressans. Nous renvoyons au mot Transpiration pour les détails, afin de ne pas nous répéter ici.

Nous dirons encore ici en abrégé, pour ne rien laisser à désirer à cet article, qu’il paroît constant que, des feuilles, il s’échappe trois différentes substances, de l’eau, de l’air & des sucs propres.

Nous avons vu comment on pouvoit obtenir l’eau : cette eau n’est que la sève extrêmement atténuée, & dépouillée de tout ce qui pouvoit servir à la nourriture de la plante ; c’est l’eau qui tenoit en dissolution la terre soluble, & les parties huileuses & salines ; c’est l’humidité atmosphérique qui a circulé & parcouru tous les canaux. Aussi cette eau végétale est-elle en général très-claire, sans saveur, & absolument comme de l’eau commune distillée. M. Hales a cependant observé que, dans les jours de grande chaleur, & où le soleil avoit été ardent, cette eau avoit une légère odeur de la décoction de la plante qui la fournit. Cela vient sans doute d’une portion de l’esprit recteur qu’elle a entraîné avec elle. Quelque transparente, quelque pure que paroisse cette eau, on doit soupçonner qu’elle ne l’est pas en effet, & qu’elle est chargée de principes même de la plante, puisqu’il est de fait qu’elle se corrompt plus promptement que l’eau commune.

La seconde substance est l’air. Les belles expériences de M. Ingen-Houze & de M. Senebier viennent de prouver que les feuilles d’une