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ramener à sa ligne droite, s’élève & fait un saut qui ne laisse pas d’être considérable, relativement à la petitesse de cet animal, puisqu’il s’élève souvent à plus de six pouces.

Au reste, ce ver ne forme pas toujours de son corps un cercle perpendiculaire à l’horizon pour sauter ; il se tient quelquefois couché sur le côté, quoique cependant la première attitude soit celle qu’il affecte le plus communément ; mais de quelque manière qu’il se pose, soit verticalement, soit horizontalement, il commence toujours constamment par courber son corps en forme de cercle, ensuite il change cette forme circulaire en forme alongée avant de sauter.

La partie postérieure de l’espèce de mouches qui déposent dans le fromage les œufs dont sortent ces vers, est armée d’une pointe si fine qu’elle peut pénétrer dans les plus petites ouvertures & dans les substances molles. C’est à l’aide de cette tarière, lorsque le trou est fait, qu’elle pousse ses œufs jusque dans le fond du trou & qu’il y est en sûreté. Aussi ces mouches, pour remplir cet objet, choisissent toujours l’endroit du fromage le plus fait, & les vers venant à éclore augmentent la pourriture, soit par les dégâts qu’ils y font, soit par leurs excrémens & par leurs différentes dépouilles.

Un fait singulier, est que ce ver peut vivre pendant très-long-temps sans prendre aucune nourriture. Il est rapporté, page 25 de l’Histoire de l’Académie des Sciences, année 1702, que M. Mollart a conservé pendant sept mois un ver sans lui donner à manger, & qu’après cette époque, il sortit de la nymphe une mouche qui vécut dix jours, également fermée dans la même boîte du microscope.

Lorsqu’il est parvenu à sa grandeur & grosseur naturelles, il se change en nymphe vermi-forme, parce qu’il conserve sa forme de ver à l’extérieur, & lorsque son enveloppe extérieure change de couleur, que la double enveloppe se fend dans toute sa longueur, on en voit sortir une mouche. (Fig. C 3, Planche VI.) Elle est représentée grossie au microscope.

Tout en admirant l’industrie de cet animal, les ressources qu’il tient de la nature pour perpétuer d’une manière sûre son espèce & la reproduire à l’infini, on ne voit pas du même œil la destruction de nos fromages, qu’il est très-difficile de prévenir.

Un autre genre d’insectes les attaque : ils sont plus destructeurs & moins dangereux, parce qu’ils ne s’attachent qu’à l’extérieur ; mais si on n’y apporte du secours, ils parviennent insensiblement à le détruire ; c’est une espèce de ciron presque invisible à l’œil nu. M. von-Linné le nomme acarus siro ; sa forme est ovale, sa tête & ses pattes un peu brunes, son ventre gros, ovale, blanchâtre, & si on l’examine au microscope, il paroît couvert de longs poils ; il se multiplie d’une manière prodigieuse.

On a proposé divers moyens pour détruire ces insectes rongeurs & corrupteurs ; en général, ils sont inefficaces, quelques-uns ont donné pour spécifique les feuilles d’arum, ou pied de veau, (voyez ce mot) avec lesquelles on doit envelopper le fromage