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CHAPITRE VII.

Des fléaux qui affligent le froment pendant sa Végétation.

Le froment est souvent exposé à l’action de plusieurs causes qui dérangent ses fonctions d’une manière sensible. Les unes, selon l’époque où elles se présentent, interrompent plus ou moins le cours de sa végétation ; les autres, se manifestant dès le premier développement, vicient & détruisent son organisation ; ainsi, dans le premier cas, le grain conserve sa forme extérieure & sa couleur, il peut encore servir à la nutrition & à la reproduction ; dans le second cas, au contraire, il est défiguré, le germe & la substance farineuse sont entièrement détruits, & par conséquent il est incapable de nourrir & de germer.

Si l’on s’en rapporte aux propos des gens de la campagne & même de quelques écrivains modernes, ce sont toujours les brouillards, les rosées, les pluies & le soleil qui occasionnent les malheurs que leur moisson essuie ; tout vient, suivant eux, de l’atmosphère, & les différens accidens qui arrivent à leur champ & leur verger, sont sans cesse attribués à la nielle ; ce mot est même tellement significatif, qu’on pourroit leur demander chaque année : qu’a fait la nielle cette année-ci ?

Il paroît que les accidens qui arrivent au froment depuis qu’il se développe, pendant qu’il croît, & jusqu’à ce qu’il soit parvenu à une parfaite maturité, ont été regardés comme des maladies dont la dénomination a singulièrement varié ; chaque pays, chaque province, chaque canton leur ont assigné des noms différens ; mais assez communément toutes les maladies du froment sont désignées par le mot charbon & nielle.

Pour éviter cette confusion & présenter, dans un ordre facile à être saisi, les divers accidens qui surviennent au froment pendant sa végétation, nous les diviserons en deux classes : la première comprendra les accidens proprement dits ; il s’agira, dans la seconde, des maladies. Si nous donnons à cet objet autant d’extension, c’est que le seigle, l’orge & l’avoine sont également assujettis à la plupart des accidens & des maladies du froment, & que les mêmes moyens proposés pour diminuer leurs effets ou les prévenir, ayant la même efficacité, nous n’y reviendrons plus, excepté cependant à l’article du seigle, où il sera question de l’ergot, maladie qui affecte plus ce grain que le froment.

Section Première.

Des accidens du Froment.

On est assez généralement d’accord que la température de chaque saison peut concourir au succès de l’agriculture ; mais combien de fois n’a-t-on pas accusé injustement l’atmosphère, en cherchant bien loin ce qui étoit près de soi, pour expliquer les différens phénomènes que présentent si souvent à l’observateur attentif, les semailles & les plantations, la germination, la floraison & la maturité des fruits ?

On sait que, si pendant la floraison il tombe des pluies abondantes, accompagnées de vents & d’orages ;