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sans tuméfaction, celui de gangrène sèche.

On connoît donc la présence de la gangrène humide, lorsqu’il se forme dans une des parties qui entrent dans la structure d’un animal quelconque, une tumeur tendue & très-dure, accompagnée d’une chaleur brûlante & quelquefois douce, que le tact indique dans la partie qui se gangrène, dont la consistance devient flasque, lacérable, & où le mouvement musculaire cesse ; quelquefois la pulsation de l’artère subsiste, quelquefois elle disparoît.

À ces signes succèdent la chute du poil qui garnit la partie gangrenée, la séparation de l’épiderme avec la peau, le déchirement de son tissu, le suintement d’une sérosité putréfiée ; &, enfin une couleur verdâtre ou livide & une puanteur cadavéreuse, annoncent sa mortification absolue.

Parmi les causes qui produisent les signes caractéristiques de la gangrène humide, l’une est prochaine & les autres sont éloignées.

La cause prochaine de la gangrène humide a lieu toutes les fois que le principe vital est anéanti dans les parties qu’elle afflige ; en conséquence de l’engorgement & de la surabondance des fluides, qui, en les surchargeant, croupissent & se putréfient d’autant plus promptement, qu’ils sont plus alcalescens & exposés à une chaleur plus âcre & à l’action de l’air ; de sorte que ce mouvement de putréfaction favorise le rapprochement des molécules sulphureuses, volatiles, & des sels alcali volatils, & leur combat mutuel établit la cause prochaine de la gangrène humide.

Les causes éloignées de cette sorte de gangrène sont les contusions, l’étranglement, l’infiltration, les inflammations, la brûlure, la morsure des bêtes venimeuses, & la pourriture.

1°. Dans les violentes contusions, les petits vaisseaux sont rompus, les fluides épanchés dans le tissu cellulaire s’y coagulent, d’autres fluides restent interceptés dans le tissu des vaisseaux : de-là l’origine de la putréfaction. Alors la nature voulant écarter ces obstacles, y pousse le sang avec plus de force ; de-là naissent la fluxion, l’engorgement, la phlogose & la douleur dans les parties affectées ; les nerfs qui ont été déchirés dans la contusion, suppurent ou se gangrènent promptement, par la chaleur qui est augmentée dans ces parties.

Il arrive souvent que la commotion des nerfs accompagne la contusion, ce qui produit leur stupeur ; l’irradiation vivifiante du fluide nerveux est interceptée ; par conséquent la partie se relâche davantage ; ce relâchement fournit un nouveau principe à la gangrène, principalement si la commotion s’étant transmise au cerveau par la charpente osseuse, elle a occasionné le délire ; car il arrive par-là que la nature est détournée de l’ouvrage de la résolution & de celui de la suppuration ; la stase, source de la putréfaction, est rendue plus considérable.

Mais s’il y a plaie, & par conséquent si l’air a accès dans la partie lésée ; si la plaie est profonde, si elle se creuse des sinus, d’où les fluides viciés sortent difficilement ; s’il y a beaucoup de vaisseaux détruits, & une grande acrimonie dans la partie ; toutes ces causes réunies donnent lieu à une gangrène qui fait de