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lement comme avec une grille d’arrosoir, pour ne pas courir le risque de déterrer la graine ; chaque trou doit être défendu par un bon entourage de petites gaules.

Le jeune plant du giroflier ne peut être enterré avec succès, que lorsqu’il sera levé avec sa motte. Sa racine étant composée d’une multitude de petits chevelus très-déliés, s’altère subitement au moindre contact de l’air ; par conséquent il faut avoir la plus grande attention à lever la motte en entier, sans ébranler ses petites racines. Il seroit encore mieux d’avoir fait un tel choix, du premier local de plantation, qu’on ne soit pas ensuite obligé de transplanter.

Le plant du giroflier levé avec cette précaution, doit être planté, comme on l’a dit, de sa graine, dans un terrain humide, préparé à l’ombre & à l’abri du vent. Le trou dans lequel on l’a placé ne doit pas être rempli de terre, il faut y laisser au moins cinq à six pouces de cavité, que l’on remplira de feuilles sèches pour conserver la fraîcheur de la terre. Il doit être entouré de branchages pour le garantir des vents, des rats & autres animaux nuisibles.

Quoique cet arbre aime l’ombre, il ne faut pas la lui donner telle qu’il ne reçoive pas les influences de l’air, il périroit infailliblement sous un arbre touffu ou qui étendroit ses racines trop au loin ; mais il se plaît à l’ombre des cocotiers, des lataniers & autres palmiers. Il lui faut un ombrage léger qui, en le garantissant de la grande ardeur du soleil, ne le prive pas des pluies, de la rosée, & en général des influences de l’air. L’ombre des arbres qui ne sont pas trop épais, est celle qui lui convient le mieux. Des petits défrichés faits adroitement dans l’intérieur des bois, dans les lieux humides, seroient certainement les plus favorables à la culture de cet arbre.

Les clous de girofle sont des fruits desséchés avant leur maturité, longs environ d’un demi-pouce, de figure de clou, presque quadrangulaire, ridés, d’un brun noirâtre, qui ont à leur sommet quatre petites pointes en forme d’étoile, au milieu desquelles s’élève une petite tête de la grosseur d’un petit pois, formée de petites feuilles appliquées les unes sur les autres en manière d’écailles qui, étant écartées & ouvertes, laissent voir plusieurs fibres roussâtres, entre lesquelles il s’élève dans une cavité quadrangulaire, un stile droit de même couleur, qui n’est pas toujours garni de sa petite tête, parce qu’elle tombe facilement. Lorsqu’on transporte les clous de girofle, ils sont âcres, chauds, aromatiques, un peu amers & agréables ; l’odeur est très-pénétrante. Le bouton qui se trouve au milieu des quatre divisions du calice, est nommé le fust du girofle.

Il faut choisir les clous bien nourris, pesans, gras, faciles à casser, piquant les doigts quand on les manie, d’un rouge foncé, garnis, s’il se peut, de leur fust, d’un goût chaud, aromatique & brûlant, d’une odeur excellente, laissant une humidité huileuse lorsqu’on les presse.

Du clou matrice. Le fruit qu’on laisse sur l’arbre, ou qui échappe à l’exactitude de ceux qui en font la récolte, continue de grossir jusqu’à la grosseur du bout du pouce, & se remplit d’une gomme dure, noire, qui est d’une agréable odeur & d’un goût