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tendre que sa partie inférieure ; & cette partie inférieure se chargera de gomme dans toutes les places où les gouttelettes d’eau se seront réunies, y auront formé un glaçon. Deux fois entr’autres j’ai observé exactement ce phénomène. C’est donc parce que l’écorce a été altérée dans ces endroits, que la gomme s’y forme, qu’elle suinte dissoute par l’eau, & qu’elle y devient concrète par l’évaporation de cette eau.

L’écorce, les bourgeons, les branches seront toujours dépourvues de gomme, tant que des accidens ou la maladresse de l’homme n’y contribueront pas ; par exemple, qu’une branche d’un abricotier, en espalier, soit balottée par les vents, qu’elle frotte contre un mur, l’écorce sera endommagée, écorchée, & la gomme surviendra ; il en sera de même par-tout où deux branches se croiseront & se heurteront.

Qu’un jardinier taille un pêcher, un cerisier, &c, lorsque la sève commence à monter ou est montée dans les branches, alors chaque coup de serpette prépare la sortie de la gomme ; la cicatrice n’a pas eu le temps de se former. Qu’un vigneron taille la vigne au moment qu’elle pleure, ou rafraîchisse à cette époque l’ancienne cicatrice, les pleurs couleront en plus grande abondance, &c. On voit par ces seuls exemples combien il est important de tailler de bonne heure. Que pensera-t-on de la mauvaise coutume établie dans plusieurs de nos provinces, où l’on attend que le pêcher soit en pleine fleur pour le tailler, & où on l’ébourgeonne au renouvellement de la sève du mois d’août ?

Après avoir examiné les causes de la gomme, voyons le mal qu’elle cause, & le remède qui lui convient. Pendant tout le temps que la sève monte dans l’arbre, la gomme augmente de volume & principalement pendant les jours pluvieux. Voilà donc déjà une perte réelle de la substance de la nourriture des branches, &c. ; aussi on voit petit à petit leurs forces diminuer, pousser des bourgeons petits, pauvres, chétif & mesquins, & ils se dessécheront à la longue.

Si la gomme est sur une forte branche, elle sera plus abondante en proportion que sur une petite, & elle augmentera toujours de volume, même pendant plusieurs années si la branche n’est pas détruite, ou si des pluies très-fréquentes, ne diminuent pas son volume. Les pores de la place occupée par la gomme ne permettent plus, pendant le jour, aucune transpiration de la partie superflue & excrémentitielles des sucs intérieurs ; ces pores ne jouissent plus du bienfait de l’air, & n’absorbent plus pendant la nuit les principes vivifians répandus dans l’atmosphère ; l’humeur excrémentitielles s’y corrompt, devient âcre & mordicante, & à la longue y forme un véritable chancre.

Rétablir le cours de la transpiration est le remède unique ; à cet effet, visitez souvent vos arbres, sur-tout après la pluie ; alors avec les doigts ou avec des linges, du drap, de la paille, &c., enlevez toute gomme. Si le chancre est formé, opérez comme il a été dit à ce mot. Si vous découvrez de la gomme pendant la sécheresse, & qu’il soit difficile de l’enlever sans nuire à l’écorce, cou-