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foiblesse des accès ; 2°. à la constitution du malade ; 3°. à la surabondance du sang ; 4°. enfin à l’épaississement sensible des humeurs, à leur âcreté & au vice de la digestion.

1°. Dans les foibles accès de goutte où il n’y a pas à craindre le repompement de l’humeur goutteuse, on ne doit appliquer aucun topique, mais seulement recommander la patience au malade, & lui faire faire des légères frictions sur la partie affectée avec des flanelles, s’il peut les supporter. Le point le plus essentiel est de tenir la partie très chaudement, afin d’y rappeler la transpiration ; une peau de mouton, telle qu’on la sort de dessus l’animal, & encore chargée de son suint, produit de bons effets. Comme cette peau est souvent remplie d’ordures, de piquans, & la laine rassemblée en petits flocons durs, il convient, avant de s’en servir, de la peigner fortement, afin que chaque brin séparé du voisin, soit plus chaud, & le tout plus mollet.

2°. La constitution du malade doit fixer l’attention du médecin. La saignée, en général, a toujours des mauvais effets dans les sujets pituiteux & flegmatiques ou délicats. On ne doit pas perdre de vue ses forces ; il faut les soutenir par des cordiaux légers, tels que le bon vin vieux, la confection hyacinthe, le quinquina & les martiaux.

3°. Si la fluxion goutteuse a un caractère inflammatoire, la saignée est très-avantageuse, pourvu qu’il n’y ait point de contre-indication. Les rafraîchissans, les nitreux légèrement acidulés, les émussions, les lavemens rafraîchissans seront très-utiles.

La suppression du flux hémorroïdal, est la cause la plus générale des accès de goutte qui viennent par surabondance d’humeurs. Le vrai spécifique dans ce cas, sera l’application des sangsues à l’anus, ou des ventouses scarifiées qui épuiseront cette humeur surabondante.

4°. L’épaississement des humeurs peut être causé par un excès des viandes trop succulentes, & sur-tout par des fortes boissons de bierre & de cidre. Le savon, l’eau seconde de chaux sont très-propres à résoudre le mucilage des humeurs porté au plus haut degré. L’usage des purgatifs, entremêlé avec le savon, peut être très-approprié dans les pays où les vins acides causent la goutte ; & le meilleur remède, dans ce cas, est de réduire le malade à la diète végétale : mais comme elle peut énerver les personnes foibles, & sur-tout les vieillards, il faut leur permettre l’usage modéré du vin, ou de tout autre cordial. Dans la goutte, avec acrimonie & altération des humeurs digestives, & où les vices de la première digestion influent sur les autres, on s’attachera sur-tout à les corriger. Pour cet effet, il n’y a pas de remède préférable au quinquina, aux amers & aux martiaux unis, âcres, savonneux. Je m’explique ; je veux qu’on préfère le quinquina aux martiaux, s’il y a des retours périodiques, & les martiaux au quina dans les tempéramens flegmatiques. L’idiosincrasie des sujets demande qu’on essaie, qu’on tâtonne. Il est prudent de commencer par les plus foibles, & par une petite dose, & augmenter peu à peu, pour pouvoir accoutumer la nature à leur action.