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sensible aux froids ; il fleurit en juin, juillet & août, suivant le climat.

Culture. Cette plante est tellement devenue indigène en France, qu’elle n’exige aucun soin particulier ; elle demande tout au plus que la plate-bande dans laquelle elle est plantée, soit travaillée au printemps, & débarrassée des mauvaises herbes. Cependant une bonne culture & un bon sol augmentent la hauteur de sa tige & le volume de ses fleurs. J’ignore s’il existe des lis blancs à fleurs doubles ; je n’en ai jamais vu.

On peut multiplier ce lis par les semences, mais cette voie est longue ; il est plus simple de se servir des caïeux, qui sont en très-grand nombre ; une seule écaille, mise en terre & soignée, produira dans la suite un oignon parfait. Le temps convenable à la séparation des caïeux, est marqué par le dessèchement complet des tiges & des feuilles ; les amateurs font cette opération tous les trois ans. L’habitant des campagnes laisse l’oignon livré à lui-même, ne le défilante jamais, & il en sort des masses de tiges. Le lis s’accommode assez bien de toutes sortes de terreins : on dit, & je ne l’ai pas éprouvé, qu’en plantant les oignons à différentes profondeurs, on avance ou l’on retarde leur fleuraison. Les lis sont très-bien dans les grandes plates-bandes des jardins ; leurs fleurs, le grouppe des feuilles & des tiges sont très-parans.

On a cherché en vain à donner artificiellement une autre couleur aux fleurs du lis, soit par des arrosemens d’eau colorée, soit en plaçant des couleurs sous l’écorce des tiges. Nous ignorons quels sont les moyens que la nature a pour décorer d’un blanc éclatant, le lys ; d’un jaune agréable, la jonquille ; d’un bleu ravissant, le bluet, &c. Laissons-là agir, elle est bien au-dessus de l’art, & toutes ses opérations sont merveilleuses, & manifestent la sagesse de celui qui a donné la vie à l’univers

Propriétés médicinales. La racine est onctueuse & grasse ; l’odeur de la fleur est agréable, mais forte, souvent très-nuisible dans les appartemens, & sur-tout dans la chambre où l’on couche, dont elle vicie l’air qu’elle rend méphitique. La racine est maturative & anodine ; les fleurs anodines & échauffantes.

Usages. L’oignon broyé ou cuit avec la mie de pain, accélère la maturité des abscès, & change en abscès une tumeur inflammatoire. L’oignon cuit sous les cendres chaudes, & mis ensuite, depuis demi-once jusqu’à deux onces, en macération dans cinq onces d’eau ou de vin blanc, est un urinaire actif ; il est employé utilement dans l’hydropisie de poitrine, & dans l’asthme pituiteux.

On fait beaucoup de cas de l’huile dans laquelle on a fait macérer des fleurs de lis : l’huile seule nouvelle, ou bonne, produiroit le même effet. L’eau distillée des fleurs est presque entièrement semblable à l’eau de rivière : son efficacité ne vaut pas la peine qu’on employe à cette opération. Cette eau est réputée cosmétique, c’est-à-dire propre à adoucir & à embellir la peau ; on ajoute même qu’elle dissipe les rides & les signes de la vieillesse. Si cette assertion étoit vraie, on verroit des champs entiers plantés en lis.