Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/339

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tacle que celui qui se développe à nos yeux au moment où la lumière, disséminée autour de nous, va s’animer par la présence du soleil, que les ténèbres de la nuit sont dissipées, que nos yeux, longtemps fermés par un sommeil bienfaisant, s’ouvrent insensiblement & se promènent sur tout ce qui nous environne ; on diroit alors qu’il se fait une nouvelle création pour nous, à mesure que nous distinguons de nouveaux objets ; ils paroissent renaître ; déjà l’éclat de la lumière augmente, les objets les plus éloignés semblent se rapprocher, parce qu’ils deviennent plus visibles ; notre domaine s’étend, nos jouissances sont plus multipliées, notre existence se multiplie avec elles. La terre se pare de couleurs éclatantes, sa beauté va frapper nos yeux à l’instant où l’astre de lumière qui anime toute la nature, s’élance rapidement de l’horizon, & s’élève au-dessus de notre séjour. Quelle majesté dans son ascension ! quelle vivacité dans ces flots de lumière qu’il lance de tous côtés ; nos yeux éblouis n’en peuvent supporter l’éclat ; ils aiment bien mieux reposer leurs regards, tantôt sur les cimes dorées des montagnes, tantôt sur l’azur qui colore le vague des airs, ou sur ces tapis verdoyons dont mille & mille fleurs naissantes marquent les différentes parties, & dessinent les contours.

La lumière a paru, tout a repris l’existence, tout revit par ses bienfaits ; l’homme, fortifié & renouvelle pour ainsi dire par un repos salutaire, retourne gaiement à son travail ; les animaux sortent de leurs retraites pour jouir de ses premières influences ; les oiseaux, portés sur leurs ailes légères, s’élèvent en chantant dans les airs, & semblent vouloir la prévenir & célébrer par leurs hymnes mélodieuses son heureux retour ; les plantes, plongées auparavant dans un vrai sommeil, s’éveillent, leurs tiges se redressent, les feuilles & leurs fleurs s’épanouissent, & déjà elles exhalent autour d’elles cet atmosphère d’air pur & vivifiant qui purifie l’air.

La matière qui vit dans les animaux & les végétaux n’est pas la seule qui ressente les bienfaits de la lumière, la matière morte & inerte en reçoit une espèce d’existence par les diverses combinaisons qu’elle est susceptible de prendre avec elle. La lumière ayant la faculté de pénétrer les corps qu’elle touche, de produire en eux la chaleur, de développer celle qui étoit engourdie dans leur sein, que de phénomènes se reproduisent alors par ce nouvel agent ! on peut même dire qu’il existe dans la nature une action & une réaction perpétuelle entre tous les corps qui sont soumis à son impression.

Si donc toute la nature éprouve une action si marquée de la part de la lumière, de quel intérêt n’est-il pas que nous cherchions à nous instruire plus particulièrement de ses propriétés & de ses effets.


Section II.

De la lumière considérée physiquement.


§. I. Qu’est-ce que la lumière.


La lumière est une matière, un fluide infiniment délié, qui en affectant notre œil de cette impression vive qu’on nomme clarté, rend les objets visibles ; ce fluide disséminé dans tout l’espace, réside nécessairement entre le corps vu & notre œil, puisque c’est lui qui nous avertit de