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vient des pluies abondantes ils ne pourrissent pas en terre avant de germer ; une petite pomme de terre entière vaut mieux que le plus gros quartier détaché de la plus grosse racine.

Lorsque le sol est humide, il convient toujours de proportionner à sa nature la quantité de pommes de terre à planter ; plus il est propre à cette plante, moins il faudra en employer : chaque arpent exige depuis deux setiers de douze boisseaux jusqu’à trois & même plus.

Le plus haut produit qu’on puisse espérer de la grosse-blanche, qui est la plus féconde, monte à cent setiers pour chaque arpent de bon sol ; le terme moyen est de soixante à soixante-dix. Cette espèce vaut communément à Paris depuis un écu jusqu’à quatre francs ; les rouges longues coûtent environ le double.

On a tout le mois d’avril, & même le mois de mai, pour s’occuper de la plantation des pommes de terre ; se presser de les planter en mars, ne sert absolument à rien ; elles courent bien plus de risques au champ qu’au grenier.

Il seroit utile que les habitans des campagnes, pratiquassent toujours les deux méthodes de culture sur deux champs particuliers, l’une à bras, pour les besoins de la famille & l’autre à la charrue, pour l’engrais des bestiaux.

La première méthode produit davantage, mais elle est plus coûteuse que la seconde, qui cependant doit toujours être préférée, lorsqu’il s’agit d’en couvrir une certaine étendue ; elle offre d’ailleurs un moyen d’occuper les vieillards & les enfans.

Cette culture, loin de nuire à celle de grains, dispose favorablement le sol a les recevoir, devient un moyen de supprimer les jachères, & de faire rapporter aux fonds les plus stériles d’autres productions.

Lorsque la sécheresse du printemps a été excessive, & qu’il existe encore dans les marchés des pommes de terre grosse-blanche, on peut en couvrir le terrain où les mars auroient manqué, & obtenir par ce moyen un supplément pour la nourriture des bestiaux ; les rouges sont inutiles alors, elles n’arriveroient pas à maturité.

Avant que la pomme de terre ne lève, il faut herser, puis la sarcler à la main, dès qu’elle a acquis trois à quatre pouces ; & quand elle est sur le point de fleurir, on la butte avec une houe ou bien une petite charrue à deux oreilles qui renverse la terre de droite & de gauche, & rechausse le pied.

Au moment où l’on vient de butter, on peut semer dans les rangs vides, de gros navets ou turneps, quand on veut tirer deux récoltes du même champ, ce qui suppose à la vérité un bon sol.

Il est possible de planter des pommes de terre dans mille endroits vagues absolument inutiles ; dans les vignes, dans les revers des fossés, dans un bois après qu’il est coupé, dans les laisses de mer, &c. &c.

Le mois d’octobre arrivé, les pommes de terre ne végètent plus à leur avantage : il ne faut pas différer d’en débarrasser le sol pour les semailles d’hiver, pour remplacer, par un grand profit, l’année de jachère, & pour prévenir l’effet des gelées blanches, qui empêcheroient qu’on ne