Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/284

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son dialogue entre théorique et pratique, il fait dire à celle-ci : « Je t’ai baillé, par exemple, les vignes de la Foye-Moniaut qui » sont entre S.-Jean d’Angéli et Niort, lesquelles vignes apportent du vin qui n’est pas moins estimé qu’hipocras ; et, bien près de là, il y a autres vignes desquelles le vin ne vient jamais à parfaite maturité, lequel est moins estimé que celui de raisinettes sauvages ; par-là tu peux penser que les terres ne sont semblables en vertus, combien qu’elles soient voisines et quelles se ressemblent en couleur et en apparence[1] ».

Nous pensons qu’on peut rapporter à la différence de nature et de position des couches inférieures de terre, celle qu’on observe dans la qualité des produits d’un sol si égal, d’ailleurs, dans toutes ses parties extérieures. Ne suffiroit-il pas, pour cela, que le dépôt des eaux souterraines fût plus ou moins profond, plus ou moins incliné dans une portion que dans l’autre ? ou que certains bancs intermédiaires, entre la couche d’argile et la couche supérieure, se prêtassent, plus ou moins facilement à l’ascension des vapeurs subterranées. Cette opinion, seulement fondée sur la vraisemblance, n’est encore, il est vrai, qu’un problème ; et nous convenons que, pour le résoudre de la manière la plus satisfaisante, il faudroit des connoissances bien autrement étendues que les nôtres, sur la minéralogie et la géologie de l’intérieur de la terre. Aussi regarderions-nous comme un ouvrage très-utile à l’agriculture, une bonne géographie souterraine. Nous n’entendons pas parler d’un livre tel qu’il en existe déjà quelques-uns, dans lesquels on se contente de dire : ici commence, là finit le filon d’une telle ou telle mine ; à telle distance, vous trouverez une carrière de marbre ou une assise de craie, ou une mine de charbon de terre qui se prolonge jusqu’à tel endroit, son plan ayant tel ou tel degré d’inclinaison. Pour nous autres cultivateurs, il faut entrer dans beaucoup plus de détails. Nous demandons à connoître tout-à-la-fois le nombre, l’épaisseur, les dimensions, la nature et le plan des bancs intermédiaires, des différentes terres, et l’ordre suivant lequel ils sont placés, depuis la couche supérieure jusqu’à celle qui forme le premier réservoir des eaux souterraines. Alors nous n’aurions plus à craindre de nous livrer à des essais dont les fâcheux résultats n’ont que trop souvent justifié notre lenteur et notre timidité à les entreprendre ; et, dans ce moment-ci, nous serions à portée de décider une question sur laquelle on n’ose présenter ses idées qu’avec une grande réserve, parce qu’elles ne sont encore étayées que sur des vraisemblances. Il s’agit de savoir si le voisinage des rivières est

  1. Voyez ses œuvres, éd. de Faujas de Saint-Fond, p. 175.