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vert. La quantité d’eau dont on peut disposer, détermine l’étendue de l’étang. On compte ordinairement soixante poissons par arpent. Le fond de l’étang doit être de terre glaise, ou de toute autre terre qui retienne les eaux ; on la couvre de sable ou de cailloux ; en haut et en bas, on doit placer une bonde, une grille et une vanne, afin qu’on puisse, à son gré, faire baisser ou augmenter les eaux. Deux caisses grillées, en forme de nasses, retiennent les truites aux deux bondes, quand elles s’élancent au dessus de la grille.

Si, pour peupler cet étang, ou est obligé de transporter les truites d’un endroit un peu éloigné, il faut ne placer, dans chaque vase, qu’un très-petit nombre de ces poissons, agiter souvent et renouveler l’eau dans laquelle on les a mis.

Tous ces soins, dont s’occupent les économes allemands, sont négligés parmi nous ; les bénéfices qu’ils procurent devroient nous engager à imiter nos voisins. C’est chez eux que s’est encore formée une méthode particulière pour se procurer des truites, ainsi que des saumons.

On fait une caisse longue de douze pieds, large d’un pied et demi, et profonde de huit pouces. Par le haut, où l’eau doit entrer, on attache en travers un morceau de bois, percé dans son milieu d’un trou de six pouces de long et de quatre pouces de large : une ouverture de quatre pouces en carré laisse en bas un passage à l’eau ; ces deux ouvertures se ferment avec un grillage en fil de fer, afin que l’alevin ne puisse pas s’échapper ; et pour que les rats d’eau et autres animaux destructeurs ne s’introduisent pas dans la caisse, on la couvre d’un couvercle percé de plusieurs trous ; au fond est du gravier, et la caisse se place de manière que l’eau puisse y entrer par le haut et s’écouler par le bas, dès qu’elle est parvenue à deux pouces au dessus du gravier. Ces dispositions faites, on prend, à l’époque du frai, les truites mâles et femelles, et on leur presse le ventre, pour en faire sortir la laite et les œufs, que l’on met dans un petit vase avec de l’eau ; on les remue ensuite avec la main, et on jette le tout dans la caisse dont je viens de parler ; on la laisse sous la chute d’eau d’une fontaine, qui coule sans cesse, et au bout de quelque temps, l’on voit éclore une multitude de petites truites.

Pêche De La Truite. Si l’art de multiplier l’espèce de la truite dans des étangs n’est pas encore très-répandu, et n’a pas toujours du succès, celui de pêcher cet excellent poisson, dans les eaux où il vit en liberté, a reçu généralement un grand développement : différens procédés sont mis en usage pour s’emparer de ce roi des eaux douces, et en faire aussi le roi des tables. Les principaux instrumens dont on se sert, sont la trouble, la ligne, la louve et la nasse.

Si l’on emploie la trouble, il faut la lever très-vite, lorsque la truite y est entrée, afin de ne pas lui donner le temps de s’élancer et de s’échapper.

La ligne doit être forte, tant du manche que du cordonnet, pour que la truite ne puisse pas la casser par ses mouvemens précipités. On garnit l’hameçon de différentes substances, de chair d’écrevisse, d’un petit poisson, d’un gros ver de terre, de sangsues coupées par morceaux, de petites boules, composées d’une partie de camphre, de deux parties de graisse de héron, de quatre parties de bois de saule pourri, et d’un peu de miel. Les Anglais, qui aiment beaucoup la pêche à la ligne, ont des insectes artificiels, assez bien imités pour que les truites s’y trompent, et qu’elles s’élancent hors de l’eau pour les saisir. Cette pêche réussit mieux vers le lever du soleil et par un beau temps ; elle se pratique en Suisse et en Franconie, à