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L’AVE-MARIA RUTEBEUF.

Que jà garde ne s’i prendront,
Que tel morsel engloutiront
Qui leur nuira,
Que la lasse d’âme cuira
En enfer, où jà ne l’ lera
Estez n’yvers.
Trop par sont les morsiaus divers
Dont la char menjuent les vers
Et en pert l’âme.
I. salu de la douce Dame,
Por ce qu’ele nous gart de blasme,
Vueil commencier ;
Quar en digne lieu et en chie,
Doit chascun metre sanz tencier
Cuer et penssée.

Ave, roïne coronée,
Com de bone eure tu fus née,
Qui Dieu portas !
Théophilus reconfortas[1]
Quant sa chartre li raportas
Que l’anemis,
Qui de mal fère est entremis,
Cuida avoir lacié et mis
En sa prison.

Maria, si com nous lison,
Tu lui envoias garison
De son malage
Qui déguerpi Dieu et s’ymage,

  1. Voyez plus loin le miracle de Théophile. Ce passage de l’Ave-Maria en est une analyse fort exacte.