Page:Ryner - Prostitués, 1904.djvu/231

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Le chevalier de la Triste Figure est un héros naturel et sa folie, d’origine littéraire — romantique, si vous voulez — lui cache le prosaïsme de son époque, fait de lui un admirable et poétique anachronisme. Un être sans consistance, comme Emma Bovary, comme Bouvard, comme Pécuchet, n’intéresse pas longtemps les hommes et, si l’auteur a l’air de croire que de telles absences d’âmes nient toute l’âme, il ne prouve que son propre vide intérieur. En vain son âpre volonté de beauté extérieure lui fait jeter d’amples draperies sur ces squelettes, on finira par apercevoir leur néant et que ces riches vêtements les écrasent. Flaubert a réussi et doit périr pour les mêmes raisons qui expliquent le succès et la ruine de l’épistolier Jean-Louis Guez de Balzac : leur conception n’est pas de force à porter leur phrase. Ici comme là, il y a la massue d’Hercule et la peau du lion de Némée ; mais c’est un enfant qui disparaît sous la fauve dépouille et qui s’épuise à soulever l’arme lourde. Flaubert serait une admirable parole romantique, s’il avait eu à faire passer par son « gueuloir » autre chose qu’une âme bourgeoise.

Cervantès, au contraire, héros bafoué par la