Page:Ségur - Diloy le chemineau, Hachette, 1895.djvu/62

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chemineau, qui recevait de temps à autre un coup des griffes terribles de l’animal. Enfin, les mouvements convulsifs cessèrent ; il resta étendu, râlant, presque étranglé, la gueule en sang. Le combat était fini, le chemineau restait vainqueur ; il lâcha un peu le nœud coulant, tira de sa poche une chaîne, la roula autour du cou de l’animal, fixa à un des chaînons le crochet qui était à un des bouts de la chaîne, et fixa l’autre bout à l’anneau de son gourdin, préparé exprès pour la circonstance, retira de dedans sa ceinture une petite barre de fer pointue, et, lâchant tout à fait le nœud coulant, laissa l’ours respirer librement, mais sans lui enlever le pieu qui maintenait la gueule ouverte.

Le chemineau.

Bon ! te voilà pris, mon garçon, et prêt à rentrer en cage. Je t’ai soigné, je t’ai donné de l’air ; il n’y a que le bâillon qui te gêne, mais tu le garderas jusqu’à ce que je t’aie ramené à la ville. À mon tour, maintenant… Gredin d’ours, m’a-t-il arrangé les jambes ; de la hanche au talon il a laissé ses marques partout. Heureusement qu’il a les griffes coupées. S’il les avait eues, il m’aurait enlevé la peau du haut en bas.

Madame d’Orvillet.

Mon pauvre homme, vous perdez tout votre sang ; laissez-moi vous bander cette blessure à la jambe ; le sang coule en abondance.

Le chemineau.

Que madame s’abaisse jusqu’à me bander la jambe ! je ne souffrirai pas cela.