Page:Ségur - Le mauvais génie.djvu/193

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
alcide.

Je n’en ai pas parce que je n’ai jamais eu une assez grosse somme à la fois. Mais à présent que nous avons de quoi, il faut que chacun de nous ait une montre. Allons chez un cousin horloger que je connais.

frédéric.

Mais si on nous voit des montres, on nous demandera qui nous les a données.

alcide.

Eh bien, la réponse est facile. Le bon Anglais, l’excellent M. Georgey.

frédéric.

Et si on le lui demande à lui-même ?

alcide.

Est-ce qu’il sait ce qu’il fait, ce qu’il donne ? D’ailleurs il ne comprendra pas, ou bien on ne le comprendra pas.

frédéric.

J’ai peur que tu ne me fasses faire une mauvaise chose et qui n’est pas sans danger, car si nous sommes découverts, nous sommes perdus.

alcide, ricanant.

Tu as toujours peur, toi. Tu as près de dix-sept ans, et tu es comme un enfant de six ans qui craint d’être fouetté. Est-ce qu’on te fouette encore ?

— Non, certainement, répondit Frédéric d’un air piqué. Je n’ai pas peur du tout et je ne suis pas un enfant.

alcide.

Alors, viens acheter une montre, grand benêt ; c’est moi qui te la donne. »