Page:Ségur - Les Bons Enfants, édition 1893.djvu/200

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— Mais il ne vit que de méchancetés.

— Et vous, mes amis, vivez de bonté et de générosité. Pardonnez-lui de vous avoir trompés et dérangés : le crime n’est pas grand.

— Tu es une bonne fille, tout de même !

— Et dire que nous te prenions pour une sorcière !

— Et dire que nous voulions te faire mourir !

— Grâce à cet être dégoûtant ! s’écria un des hommes qui le soutenaient et qui le jeta par terre.

— Vive Lamalice ! Un triomphe pour Lamalice !

— Oui ! oui ! oui ! Un triomphe ! Portons-la dans le village ! elle mérite cet honneur ! »

Et, malgré la résistance de Lamalice, ils la placèrent sur une chaise tenue par quatre hommes et la portèrent autour de la place en criant :

« Vive Lamalice ! À bas Esbrouffe ! »

Lamalice aurait bien voulu se sauver et rentrer chez elle, mais elle chercha en vain à s’échapper ; la foule croyait réparer le mal qu’elle avait fait ; d’ailleurs cette promenade amusait ces bonnes gens ; tout ce qui est nouveau et bruyant amuse la foule ; on hurle parce que les autres crient ; on court parce que les autres marchent. On ne donna à Lamalice sa liberté que lorsque chacun fut las de crier et de courir.

Pendant le triomphe de Lamalice, Esbrouffe avait reçu sa punition. Une partie de la foule était restée un peu en arrière ; on avait attaché Esbrouffe sur une échelle que quatre hommes portaient en l’air ; tous criaient « À bas Esbrouffe le menteur !