Page:Ségur - Les Bons Enfants, édition 1893.djvu/292

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vaux trottaient, galopaient, allaient bon train ; le cocher se réjouissait de n’avoir plus qu’une demi-heure à faire pour sortir de la forêt, lorsqu’on entend un hououou ! très éloigné.

« Les loups ! crie le cocher ; les loups !

— Fouettez les chevaux, Nikita, s’écria le maître, nommé M. Bogoslafe, fouettez ferme ; tâchons de sortir de la forêt avant que les loups nous aient rejoints. »

Le cocher fouette ; les chevaux, tremblants eux-mêmes, vont comme le vent. Les hurlements se rapprochaient pourtant ; la peur donnait des ailes aux chevaux. Nikita se retournait de temps en temps ; il ne voyait pas les loups ; mais une fois, après s’être retourné, il crie :

« Les voici ! je vois une masse noire dans le lointain ; il y en a plus de cinq cents.

— Nous sommes perdus ! dit M. Bogoslafe.

— Non, mon cher maître ; nous pouvons encore être sauvés, si Dieu nous protège. Je connais une grange à cent pas d’ici. Si la grande porte est ouverte, nous sommes sauvés. »

Et, fouettant les chevaux avec une nouvelle vigueur, il les dirige vers la grange, dont la grande porte restait heureusement ouverte pour laisser aux voyageurs la facilité d’entrer et se mettre à l’abri des loups, qui ne tardaient ordinairement pas à se disperser. Les hurlements des loups devenaient de plus en plus distincts ; la masse noire avançait toujours ; Nikita touche à la grange, y entre ventre à terre ; les chevaux s’abattent en