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LES MALHEURS DE SOPHIE

rouge, la tête baissée, les yeux pleins de larmes. Elle eut envie un instant d’avouer à sa bonne que c’était elle qui avait tout fait, mais le courage lui manqua. La bonne, la voyant triste, crut que c’était la mort des pauvres petits poissons qui l’affligeait.

« J’étais bien sûre, dit-elle, que vous seriez triste comme votre maman du malheur arrivé à ces pauvres petites bêtes. Mais il faut se dire que ces poissons n’étaient pas heureux dans leur prison : car enfin cette cuvette était une prison pour eux ; à présent que les voilà morts, ils ne souffrent plus. N’y pensez donc plus, et venez que je vous arrange pour aller au salon ; on va bientôt dîner. »

Sophie se laissa peigner, laver, sans dire mot ; elle entra au salon ; sa maman y était.

« Sophie, lui dit-elle, ta bonne t’a-t-elle raconté ce qui est arrivé à mes petits poissons ?

sophie.

Oui, maman.

madame de réan.

Si ta bonne ne m’avait pas assuré que tu étais restée avec elle dans ta chambre depuis que tu m’as quittée, j’aurais pensé que c’est toi qui les as fait mourir ; tous les domestiques disent que ce n’est aucun d’eux. Mais je crois que le domestique Simon, qui était chargé de changer tous les matins l’eau et le sable de la cuvette, a voulu se débarrasser de cet ennui, et qu’il a tué mes pauvres poissons pour ne plus avoir à les soigner. Aussi je le renverrai demain.