Page:Ségur - Mémoires d’un âne.djvu/37

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aux camarades, et voilà que tous nous nous secouons tant et plus. Plus de charbon, plus de numéros ; il faut tout recommencer : les enfants sont en colère. Charles triomphe et ricane ; Ernest, Albert, Caroline, Cécile et Louise crient contre Antoine, qui tape du pied ; ils se disent des injures ; mes camarades et moi, nous nous mettons à braire. Le tapage attire les papas et les mamans. On leur explique la chose. Un des papas imagine enfin de nous ranger le long du mur. Il fait tirer les numéros aux enfants.

« Un ! s’écrie Ernest. C’était moi.

— Deux ! dit Cécile. C’était un de mes amis.

— Trois ! dit Antoine. Et ainsi de suite jusqu’au dernier.

— À présent, partons, dit Charles. Moi, d’abord, je pars le premier.

— Oh ! je saurai bien te rattraper, lui répondit vivement Ernest.

— Je parie que non, reprit aussitôt Charles.

— Je gage que si », répliqua Ernest.

Voilà Charles qui tape son âne et qui part au galop. Avant qu’Ernest ait eu le temps de me donner un coup de fouet, je pars aussi, mais d’un train qui me fait bien vite rattraper Charles et son âne. Ernest est enchanté, Charles est furieux. Il tape, il tape son âne ; Ernest n’avait pas besoin de me frapper, je courais, j’allais comme le vent. Je dépasse Charles en une minute ; j’entends les autres qui suivent en riant et en criant :