Page:Ségur - Nouveaux contes de fées.djvu/54

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qu’elle en voulut. Elle remit l’écuelle, baisa Blanchette et la vit partir avec l’espérance de la voir revenir dans la journée.

En effet, chaque jour, le matin, à midi et au soir, Blanchette venait présenter à Blondine son frugal repas.

Blondine passait son temps à pleurer ses pauvres amis, à se reprocher amèrement ses fautes.

« Par ma désobéissance, se disait-elle, j’ai causé de cruels malheurs qu’il n’est pas en mon pouvoir de réparer ; non seulement j’ai perdu mes bons et chers amis, mais je me suis privée du seul moyen de retrouver mon père, mon pauvre père qui attend peut-être sa Blondine, sa malheureuse Blondine, condamnée à vivre et à mourir seule dans cette affreuse forêt où règne mon mauvais génie ! »

Blondine cherchait à se distraire et à s’occuper par tous les moyens possibles ; elle avait arrangé sa cabane, s’était fait un lit de mousse et de feuilles ; elle avait relié ensemble des branches dont elle avait formé un siège ; elle avait utilisé quelques épines longues et fines pour en faire des épingles et des aiguilles ; elle s’était fabriqué une espèce de fil avec des brins de chanvre qu’elle avait cueillis près de sa cabane, et elle avait ainsi réussi à raccommoder les lambeaux de sa chaussure, que les ronces avaient mise en pièces. Elle vécut de la sorte pendant six semaines. Son chagrin était toujours le même, et il faut dire à sa louange que ce n’était pas sa vie triste et solitaire qui entretenait