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la villa de rugel

Oréalis, la fille chérie de Rugel, était d’une splendide beauté.

Elle était à cet age où la jeune fille devient femme et unit encore les grâces de l’enfance au charme pénétrant de la jeunesse. Son visage régulier, expressif, était éclairé par deux grands yeux noirs, qui, dans son teint d’un blanc légèrement rosé, brillaient comme deux sombres diamants. Leur éclat était tempéré par une infinie douceur : ils étaient les interprètes d’une âme pure, mais accessible aux sentiments les plus élevés et aux plus généreuses passions. D’épais cheveux d’un blond cendré encadraient ce radieux visage et retombaient en flots soyeux et ondulés sur ses épaules. Un étroit cercle d’or, où s’enchâssaient d’étincelantes pierreries, était posé sur cette adorable chevelure et faisait scintiller leurs mille feux au milieu de ses teintes adoucies. Elle était vêtue d’une étoffe vaporeuse et légère, d’une éblouissante blancheur, dont les manches flottantes laissaient l’avant-bras à nu et qui, relevée sur le côté, découyrait une tunique d’azur aux broderies d’argent. Sa taille assez élevée était svelte et bien prise et offrait d’admirables proportions. Phidias n’aurait pu rêver modèle plus parfait lorsqu’il faisait jaillir du marbre ces jeunes immortelles où les formes les plus parfaites du corps féminin semblaient comme baignées d’une atmosphère divine.

Sa démarche était harmonieuse et souple ; ses gestes étaient nobles et dignes, et, à la voir s’avancer d’un pas rhytmique et cadencé, on ne pouvait s’empécher de murmurer le vers du poète :

Et vera incessu patuit Dea.

Parfois, lorsqu’une pensée joyeuse agitait doucement son âme, lorsqu’elle revoyait son père après quelque temps d’absence, son visage, aux lignes ordinairement calmes et tranquilles, s’illuminait d’un céleste sourire.

On ne pouyait la voir sans se sentir gagné par l’attrait qui émanait d’elle ; tous ceux qui l’approchaient l’aimaient et l’entouraient d’un religieux respect.

Trois femmes de la famille de Rugel l’aidaient, dans cette paisible demeure, à entourer de soins et d’affection celui dont tout le