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un monde inconnu

sement : il se releva péniblement et, ne voyant rien, n’entendant aucun bruit, il se sentit le cœur pris d’une anxiété mortelle.

« Où sommes-nous ? se dit-il, que s’est-il passé ? »

Et il appela : « Jacques ! Milord ! »

Rien ne lui répondit.

Une sueur froide coula sur ses membres ; il frissonna d’horreur. Il chercha autour de lui en tâtonnant et bientôt sa main rencontra un bouton de cuivre qu’il pressa brusquement. Un jet de lumière électrique illumina l’intérieur de l’obus : Jacques et lord Rodilan gisaient à terre immobiles. Marcel se pencha tout d’abord vers son ami d’enfance : le jeune médecin était d’une pâleur cadavérique ; son cœur ne battait que faiblement. « Mon Dieu ! » murmura Marcel. Et, le soulevant avec précaution, il l’étendit sur le divan, la tête appuyée sur des coussins. Il défit précipitamment ses vêtements, mettant sa poitrine à nu. Mais c’est en vain qu’il lui fit respirer des sels violents, en vain qu’il frotta ses tempes et son front de vinaigre, en vain qu’il fit couler entre ses dents serrées quelques gouttes d’un puissant cordial : l’évanouissement de Jacques persistait.

Marcel se sentait pris par le désespoir. Découragé, il ne savait plus quel moyen employer lorsqu’un faible soupir s’échappa des lèvres du malade. Penché sur lui, Marcel tout frémissant se mit alors à le frictionner vigoureusement dans la région du cœur.

Bientôt sa respiration devint plus forte et les couleurs de la vie commencèrent à reparaître sur ses joues.

« Ah ! mon cher Jacques, que tu m’as fait peur ! murmura-t-il.

— Eh bien ! dit Jacques, d’une voix encore faible, hésitante, qu’est-il arrivé ?

— Ah ! pour cela, je n’en sais absolument rien ; mais avant de nous en assurer, il faut voir en quel état se trouve notre compagnon de voyage.

— Est-il donc blessé ? s’écria Jacques.

— Je l’ignore, je n’ai d’abord songé qu’à toi ; je vais maintenant m’occuper de lui.

— Et je vais t’y aider, mon cher Marcel, car maintenant mes forces sont à peu près revenues. »