Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/127

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offense ? Ce n’est que lorsque des torts graves et multipliés ont vaincu sa patience, et lorsque le mal qu’il redoute est plus grand que celui qu’il punit, qu’enfin il se décide à prononcer cette terrible sentence. Il tente auparavant tous les moyens pour ramener au bien un caractère encore indécis, ou même inclinant déjà vers le vice ; il attend, pour recourir à de telles extrémités, que tout soit désespéré : il n’inflige ce châtiment qu’après avoir épuisé tous les remèdes.

Le devoir d’un père est aussi le devoir du prince que nous appelons Père de la patrie ; car ce n’est pas par une vaine flatterie que nous lui avons conféré ce nom ; il n’a reçu les autres que par honneur ; quand nous qualifions nos empereurs de grands, d’heureux, d’augustes, quand nous prodiguons à leur orgueilleuse majesté tout cet assemblage de titres que notre imagination a pu nous fournir, c’est pour eux-mêmes que nous leur payons ce tribut ; mais lorsque nous nommons un prince père de la patrie, c’est afin qu’il sache que l’autorité qui lui a été conférée est toute paternelle, c’est-à-dire pleine de moderation, veillant activement aux intérêts de ses enfants, et préférant leur bien-être au sien. Que celui qui est père ne se décide que bien tard à retrancher un de ses membres ; que même, après que le fer l’a séparé du corps, il forme le vœu de pouvoir l’y rattacher, et qu’il gémisse dans cette cruelle opération longtemps différée ! Qui condamne précipitamment est près de condamner avec plaisir ; qui punit trop est près de punir injustement. De nos jours, Érixon, chevalier romain, fut percé de coups de poinçon par le peuple, au milieu du forum, pour avoir fait périr son fils sous le fouet. L’autorité d’Auguste