Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/191

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sions pour objet, non de déroger à la justice, mais de s’y conformer plus exactement. Pardonner, c’est ne pas punir ce que l’on juge digne de punition. Le pardon est la remise d’une peine méritée, la clémence a pour effet immédiat de déclarer que ceux qu’elle affranchit de la condamnation, n’ont dû être soumis à aucune peine autre que celle qu’elle réserve.

Elle est donc plus large et plus honorable que le pardon. A mon avis, on ne dispute que sur les mots, et on est d’accord sur les choses. Le sage remettra un grand nombre de peines ; il conservera beaucoup d’hommes dont l’âme est malade, mais susceptible de guérison ; il imitera les agriculteurs habiles, qui ne se bornent pas à cultiver les arbres dont la tige est droite et élevée, mais qui adaptent à ceux que quelque accident a fait dévier, des appuis au moyen desquels ils les redressent, élaguant les uns pour que l’abondance de leurs branches ne les empêche pas de croître en hauteur, fournissant des engrais à ceux qui souffrent de la stérilité du terrain, et donnant de l’air à ceux qui languissent sous une ombre étrangère. De même, le véritable sage examine quels moyens il faut employer à l’égard des divers caractères, pour rectifier progressivement leur mauvaise direction.