Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/305

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d’hommes, et de la haine je suis revenue à la bonne intelligence, si toutefois elle peut exister entre les méchants ; c’est de moi-même que je ne suis pas encore amie. J’ai apporté tous mes soins à me tirer de la foule et à me distinguer par quelque bonne qualité : qu’ai-je fait autre chose, que de me présenter aux traits, et d’offrir à la malveillance de quoi mordre ? » Voyez-vous ces gens qui vantent l’éloquence, qui escortent la richesse, qui flattent la faveur, qui exaltent le pouvoir ? Tous ils sont hostiles, ou, ce qui revient au même, ils peuvent l’être. Autant est nombreux le peuple des admirateurs, autant l’est celui des envieux.

III. Quant à moi, je cherche plutôt quelque chose qui soit bon à l’user, que je sente, et non que j’étale aux yeux. Ces objets que l’on regarde, devant lesquels on s’arrête, que l’un tout ébahi montre à l’autre, au dehors ils brillent, au dedans ils sont misérables. Cherchons quelque chose qui soit, non pas bon en apparence, mais solide, égal, et d’autant plus beau, que l’on y pénètre plus avant. Voilà ce qu’il faut arracher du fonds qui le recèle ; et ce n’est pas loin ; on le trouvera ; il faut seulement savoir, où porter la main. A présent, comme dans les ténèbres, nous passons au delà de ce qui est près de nous, heurtant contre cela même que nous désirons. Mais, pour ne pas vous traîner à travers des préambules, je passerai sous silence les opinions des autres ; car il serait long, et de les énumérer, et de les réfuter : c’est la nôtre, que voici. Quand je dis la nôtre, je ne m’attache point à tel ou tel prince des stoïciens5 ; et moi aussi, j’ai le droit d’opiner. En conséquence, avec l’un, je me rangerai de son avis ; quant à l’autre, j’exigerai qu’il divise6. Peut-être même, appelé à voter après